Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/16

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Le 15 août, le cardinal étant déjà revêtu de ses habits pontificaux, fut appelé à midi, dans le cabinet du roi, où se trouvait la reine. Le roi lui dit : « Vous avez acheté des diamans à Bœhmer ? — Oui, Sire. — Qu’en avez-vous fait ? — Je croyais qu’ils avaient été remis à la reine. — Qui vous avait chargé de cette commission ? — Une dame appelée madame la comtesse de Lamotte-Valois, qui m’avait présenté une lettre de la reine, et j’ai cru faire ma cour à Sa Majesté en me chargeant de cette commission. » Alors la reine l’interrompit et lui dit : « Comment, Monsieur, avez-vous pu croire, vous à qui je n’ai pas adressé la parole depuis huit ans, que je vous choisissais pour conduire cette négociation, et par l’entremise d’une pareille femme ? — Je vois bien, répondit le cardinal, que j’ai été cruellement trompé ; je paierai le collier ; l’envie que j’avais de plaire à Votre Majesté m’a fasciné les yeux ; je n’ai vu nulle supercherie, et j’en suis fâché. » Alors il sortit de sa poche un porte-feuille, dans lequel était la lettre de la reine à madame Lamotte, pour lui donner cette commission. Le roi la prit, et la montrant au cardinal, lui dit : « Ce n’est ni l’écriture de la reine, ni sa signature : comment un prince de la maison de Rohan, et un grand-aumônier de France, a-t-il pu croire que la reine signait Marie-Antoinette de France ? Personne n’ignore que les reines ne signent que leur nom