Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/195

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

de toute l’Europe, de laisser l’esprit révolutionnaire amener en France une république organisée. « Toutes les fois que Pitt, disait-elle, s’est prononcé sur la nécessité de maintenir en France une monarchie, il a gardé le plus absolu silence sur ce qui concerne le monarque. Le résultat de ces entretiens n’a rien que de sinistre ; mais cette monarchie même qu’il veut sauver, en nous laissant succomber, en aura-t-il les moyens et la force ? »

La mort de l’empereur Léopold arriva le 1er mars 1792. La reine était sortie lorsque la nouvelle en parvint aux Tuileries. À son retour, je lui remis la lettre qui la lui annonçait. Elle s’écria que l’empereur avait été empoisonné ; qu’elle avait remarqué et conservé une gazette où, dans un article de la séance des jacobins, à l’époque où l’empereur Léopold s’était déclaré pour la coalition, on disait, en parlant de lui, qu’une croûte de pâté pourrait arranger cette affaire. Dès ce moment, la reine avait regardé cette phrase comme échappée aux propagandistes. Elle regretta son frère. L’éducation de François II, dirigée par l’empereur Joseph, lui donnait cependant de nouvelles espérances : elle pensait qu’il devait avoir hérité de ses sentimens pour elle, et ne doutait pas qu’il n’eût puisé, près de son oncle, cet esprit de valeur si nécessaire au soutien des couronnes. À cette époque, Barnave avait obtenu de la reine de lire toutes les lettres qu’elle écrirait. Il craignait les