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plus leurs pâques publiquement, parce qu’elles ne pouvaient se prononcer pour le clergé constitutionnel, ni agir de manière à prouver qu’elles lui fussent contraires.

La reine fit ses pâques en 1792 ; mais elle se rendit seule avec moi à la chapelle. Elle m’avait chargée de prévenir un de mes parens, qui était son chapelain, de lui dire une messe à cinq heures du matin. Il faisait encore nuit ; elle me donnait le bras, et je l’éclairais avec un bougeoir. Je la laissai absolument seule à la porte de la chapelle ; elle ne revint chez elle que lorsque le petit jour commençait à poindre. Ces pâques, aussi mystérieusement faites, ne pouvaient servir à l’édification publique, mais prouvent en faveur des principes religieux de la reine.

Le danger augmentait chaque jour. L’Assemblée se fortifiait, aux yeux du peuple, par les hostilités des armées étrangères et de l’armée des princes. La communication avec ce dernier parti devenait plus active ; la reine écrivait presque tout le jour. M. de Goguelat avait sa confiance pour toute sa correspondance avec l’étranger, et j’étais forcée de l’avoir chez moi, la reine le demandant très-souvent et à des heures qu’elle ne pouvait indiquer.

Tous les partis s’agitaient, soit pour perdre le roi, soit pour le sauver. Un jour je trouvai la reine extrêmement troublée ; elle me dit qu’elle ne savait plus où elle en était ; que les chefs des jacobins se faisaient offrir à elle par l’organe de Dumouriez,