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soir quand le palais fut entièrement évacué. Douze députés, guidés par leur attachement à la personne du roi, étaient venus se ranger auprès de lui, dès le commencement de l’insurrection ; mais la députation de l’Assemblée n’arriva aux Tuileries qu’à six heures du soir ; toutes les portes des appartemens étaient brisées. La reine montrait aux députés l’état dans lequel était le palais du roi, et la manière outrageante dont on avait violé son asile sous les yeux même de l’Assemblée : elle s’aperçut, pendant qu’elle parlait, que Merlin de Thionville était attendri au point de verser des larmes. «  Vous pleurez, M. Merlin, lui dit-elle, de voir le roi et sa famille traités si cruellement par un peuple qu’il a toujours voulu rendre heureux. — Il est vrai, Madame, lui répondit Merlin ; je pleure sur les malheurs d’une femme belle, sensible et mère de famille ; mais ne vous y méprenez point, il n’y a pas une de mes larmes pour le roi ni pour la reine ; je hais les rois et les reines ; c’est le seul

    en faisaient naturellement un héros de la petite populace. Aussi s’était-il acquis, sur la lie du faubourg, un empire despotique. Il la faisait mouvoir à son gré ; mais c’était aussi tout ce qu’il savait et pouvait faire, car, du reste, il n’était ni méchant ni cruel. Il entrait en aveugle dans toutes les conspirations, mais jamais il ne se rendait coupable de l’exécution, ni par lui-même, ni par ceux qui lui obéissaient. Un malheureux, de quelque parti qu’il fût, intéressait toujours son cœur. L’affliction et les larmes désarmaient ses mains. » (Histoire de Marie-Antoinette, par Montjoie, pages 295 et 296.)

    (Note de l’édit.)