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sentiment qu’ils m’inspirent, c’est ma religion. » La reine ne pouvait s’expliquer une semblable frénésie, et voyait tout ce qu’on devait redouter de gens qui en étaient possédés.

Tout espoir était perdu, on ne pensait plus qu’aux secours étrangers. La reine implorait sa famille et les frères du roi ; ses lettres devenaient probablement plus pressantes, et exprimaient ses craintes sur la lenteur des secours. Sa Majesté m’en lut une de l’archiduchesse Christine, gouvernante des Pays-Bas : elle lui reprochait quelques-unes de ses expressions, et lui disait que, hors de France, on était au moins aussi alarmé qu’elle sur la position du roi et sur la sienne ; mais que la manière de la secourir pouvait amener son salut ou sa perte ; et que, chargée d’intérêts aussi chers, la coalition devait agir avec prudence.

Le 14 juillet, destiné par la constitution à l’anniversaire de l’indépendance de la nation, approchait. Le roi et la reine étaient contraints d’y paraître ; sachant que le complot du 20 juin avait leur assassinat pour but, ils ne doutèrent pas que leur mort ne fût arrêtée pour le jour de cette fête nationale. On conseilla à la reine, pour donner aux amis du roi le temps de les défendre, si l’attaque avait lieu, de le garantir du premier coup de poignard en lui faisant porter un plastron. J’eus ordre d’en faire faire un chez moi : il était composé de quinze épaisseurs de taffetas d’Italie, et consistait en un gilet et une large ceinture. L’essai de ce plastron fut fait ; il