Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/284

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placé dans le secrétaire de porcelaine de Sèvres, qui est dans son petit boudoir.

Tout cela ce sont des mensonges ; et vous êtes bien coupable, ayant prêté serment de fidélité au roi et à la reine par les charges que vous possédez auprès de leurs personnes, de traiter à l’insu du roi pour la reine, lorsqu’il s’agit d’un objet aussi important, et avec elle sans avoir directement reçu ses ordres.

Cette dernière remarque frappa ce dangereux imbécille ; il me demanda ce qu’il avait à faire. Je lui conseillai d’aller trouver M. le baron de Breteuil, son ministre, depuis qu’il avait la charge de garde des diamans de la couronne, de lui dire avec sincérité tout ce qui s’était passé, et de se laisser diriger par lui. Il m’assura qu’il préférait me charger de cette explication avec la reine. Je m’y refusai, démêlant dans son récit un foyer d’intrigues que la prudence devait me faire éviter. Je passai dix jours à ma campagne sans entendre parler de cette affaire. La reine m’ayant fait demander au petit Trianon, pour répéter avec moi le rôle de Rosine, qu’elle devait jouer dans le Barbier de Séville, je me trouvai seule avec elle, assise sur son canapé ; il ne fut question que du rôle. Après une heure employée en répétition, Sa Majesté me demanda pourquoi je lui avais envoyé Bœhmer ; qu’il était venu pour lui parler de ma part ; qu’elle n’avait pas voulu le voir. J’appris de cette manière qu’il n’avait rien fait de ce que je lui avais conseillé.