Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/323

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finances, et ajouta qu’il fallait bien aussi compter quelquefois sur la reconnaissance. Elle m’indiqua alors le garçon de toilette que je devais mener avec moi pour lui faire parfaitement connaître le logement de madame Coster dans les galeries du Louvre, lorsqu’il porterait le porte-feuille. La reine me recommanda essentiellement, la veille de son départ, de gagner Lyon et les frontières aussitôt qu’elle serait partie. Elle me conseilla de prendre avec moi une personne de confiance qui fût capable de rester auprès de M. Campan, lorsque je le quitterais, et m’assura qu’elle ferait donner l’ordre à M. *** de partir aussitôt qu’on la saurait aux frontières, pour protéger ma sortie. Elle voulut bien ajouter qu’ayant encore une longue course à faire dans les pays étrangers, elle voulait me remettre trois cents louis. Je baignai de larmes les mains de la reine au moment de cette douloureuse séparation ; ayant de l’argent à ma disposition, je refusai son or. Je ne redoutais pas la route pénible que j’avais à faire pour la rejoindre ; j’appréhendais que, par des trahisons ou par de mauvaises combinaisons, un projet, dont la sûreté ne m’était pas assez démontrée, ne vînt à manquer. J’aurais répondu de tout le service intérieur de la reine, et j’avais raison ; mais sa femme de garde-robe me causait de justes alarmes. J’osai les communiquer à la reine ; je n’avais jamais profité de la confiance dont elle m’honorait pour desservir personne, et, dans ce moment, il était de mon devoir d’agir en opposition avec mes prin-