Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 1.djvu/469

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distinctives de la laine. Le feuillage peut, en certains moments, le protéger contre l’ardeur du soleil ; mais pour obtenir un abri convenable contre la température, il faut qu’il apprenne à abattre un arbre et à le convertir en poutres ou en planches. L’accomplissement de ces actes exige la science ; à chaque pas qu’il fait dans l’acquisition de celle-ci, il obtient un empire plus étendu sur les forces naturelles destinées à son usage ; en même temps qu’à chaque pas se développe, de plus en plus, l’utilité du blé, de la laine et du bois de construction, avec une diminution constante dans la valeur des subsistances, des vêtements, de l’abri dont il a besoin, et un accroissement de richesse également constant.

De toutes les magnifiques et merveilleuses mesures de prévoyance de la nature, il n’en est probablement pas de plus belle que celle qu’on peut observer ici. La nécessité de changer la forme des produits végétaux et animaux, avant qu’ils puissent être appropriés à la consommation de l’homme, constitue un obstacle qu’il faut surmonter ; obstacle qui n’existe pas pour les oiseaux, pour les quadrupèdes, ou les poissons, auxquels la nourriture est fournie sous la forme qui leur est précisément nécessaire. Il en est de même du vêtement que la nature fournit, aussi, complètement aux autres animaux ; tandis que l’homme est obligé de changer la forme du lin, de la soie et de la laine, avant qu’ils puissent servir à ses besoins ; et c’est ici que nous trouvons le puissant aiguillon pour l’activité de l’intelligence, qui conduit au développement de l’individualité et rend l’homme propre à l’association avec ses semblables. Si la nourriture et le vêtement lui eussent été fournis libéralement, et sous la forme nécessaire, ses facultés seraient restées, partout, aussi complètement inertes et inutiles que le sont aujourd’hui celles des peuples habitant les régions tropicales, parmi lesquels des familles entières pourvoient à la première avec l’arbre seul qui porte le fruit à pain, tandis que le second est remplacé par le soleil d’un été perpétuel. La nature fournissant à ces besoins spontanément, il n’existe que peu de motifs pour exercer les facultés par lesquelles l’homme se distingue de la brute, facultés qui, en conséquence, demeurent sans extension ; et, comme résultat nécessaire, la faculté et l’habitude d’association se trouvent ici le moins développées. L’homme a été placé ici-bas pour conquérir l’empire de la nature, et, dans ce