Page:Carné - Souvenirs de ma jeunesse au temps de la Restauration.djvu/102

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rales les repoussaient presque unanimement. Ces institutions étaient vues avec inquiétude par le clergé séculier, avec colère par la plupart des membres des ordres monastiques, qui se firent sur tous les points du royaume les promoteurs et les chefs de l’insurrection miguéliste. La noblesse provinciale, plus active et bien plus populaire en Portugal que la fidalgie séquestrée à Lisbonne, se voyant exclue presque tout entière de la Chambre haute réservée à cette noblesse de cour, et n’ayant aucun motif pour se montrer favorable au nouveau régime politique, lui fit à peu près partout une guerre ouverte. Si donc le suffrage universel avait été découvert et déjà pratiqué au début du conflit engagé entre l’infant et sa nièce, jamais le nom de dona Maria II n’aurait figuré dans la liste des rois très-fidèles, et D. Miguel aurait eu certainement, dans la Péninsule, son scrutin triomphal du Dix-Décembre. L’armée, qui constitue la seule force effective au sein de cette nation à la fois inerte et bruyante, se trouva, durant cette lutte, partagée en deux parties à peu près égales ; de là les conflits militaires plus longs d’ailleurs que sanglants dans lesquels s’épuisa le pays, jusqu’au moment où la révolution consommée en Espagne en 1833, par l’avènement d’Isabelle II, décida en Portugal le triomphe définitif du parti constitutionnel.

Dans le courant des années 1827 et 1828, Lisbonne offrit à l’Europe un triste spectacle appelé à se reproduire trente ans après sur un plus vaste théâtre, celui d’une révolution commencée par le parjure et terminée