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chrétienne par le Dictionnaire de Bergier, la Philosophie de Lyon et la Théologie de Poitiers.

Le Catholique qui parut de 1825 à 1830, en épaisses livraisons mensuelles, était une œuvre à peu près sans publicité, quoique ce recueil ne justifiât pas moins son titre par l’orthodoxie des doctrines que par l’universalité des questions qui y étaient abordées. Révéler à la France les monuments sacrés de l’Inde antique, vulgariser tous les travaux de l’érudition germanique en philologie et en histoire, joindre à ces études les aperçus les plus élevés sur les problèmes de la politique contemporaine, une telle entreprise était aussi originale que grandiose, et le baron d’Eckstein était le seul homme en France qui put en porter le poids sans fléchir. Ces gros in-octavo ont de grands défauts littéraires sans doute ; toutefois, lorsque le moment sera venu d’élever un monument définitif à la philosophie de l’histoire, et de constater l’identité des traditions universelles avec les enseignements du Sinaï et du Calvaire, on relira avec un étonnement respectueux la collection unique dans laquelle un homme dépensa, dans l’ombre, les plus merveilleuses facultés sans être jamais soutenu ni par le stimulant du succès, ni même par celui de la contradiction. La conspiration du silence organisée autour du Catholique par les amis comme par les adversaires de l’écrivain, fut un véritable signe du temps. Aux yeux des savants, M. d’Eckstein avait le tort d’être catholique, aux yeux des catholiques il avait le tort d’être savant.