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LA JEUNESSE EN 1829.

convocation des états généraux jusqu’à l’octroi de la charte, aucune concession n’avait profité ni à la monarchie ni à la France. Il nous fallut donc, au début, un peu de condescendance, et beaucoup d’adresse, pour tourner ce cap périlleux sans y briser notre frêle embarcation ; il nous fallut surtout, pour demeurer parfaitement maîtres du terrain, le décisif argument du succès.

Celui-ci ne nous manqua point : Le Correspondant réussit promptement. Il fut très-recherché même parmi les lecteurs du Globe, curieux de voir des hommes du monde, qui n’avaient passé ni par les séminaires ni par l’École normale, aborder les questions philosophiques dont le journal de MM. Damiron et Jouffroy comptait bien s’être assuré le monopole. En entendant des catholiques pousser le cri de saint Paul et se déclarer citoyens, le ton de la polémique se modifia, car, au lieu de témoigner aux morts une sorte de respect facile, on se vit dans le cas de compter avec des vivants fort résolus à ne point laisser célébrer leurs funérailles. En présence du vieux dogme qui s’affirmait, on parla moins du dogme nouveau toujours caché dans les nuages. Les prophéties furent abandonnées aux hiérophantes de la rue Taitbout, promettant chaque semaine à leur public d’apporter un symbole religieux pour la séance suivante ; et le Globe, placé entre une partie de la jeunesse catholique déterminée à ne point s’ensevelir sous des ruines, et la portion de la jeunesse rationaliste qui prêtait aux prophètes une oreille complaisante, passa aux mains