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sait sans doute davantage , la fraternité préférée h tout, même au serxice des dames.

O charme simple et naïf d'une scène intérieui^ et domestique ! Combien d'autres non moins dou- ces , non moins touchantes, oubhées et ensevelies dans le secret de cette heureuse demeure , asile de l'amitié ! Pourquoi faut-il que l'âge et le temps lui en offrent de plus affligeantes et de plus dou- loureuses ! Ah! la vieillesse avance ; elle amène l'idée d'une séparation : la mort leur est affreuse. Ils frémissent : leurs cœurs se précipitent l'un vers l'autre ; ils se serrent, se pressent avec terreur ; ils mêlent et confondent leurs pleurs , leurs craintes, dirai-je leurs espérances ? Il en est une qu'ils sai- sissent, qu'ils embrassent avec tendresse : ils sont nés à la même heure; si la même heure à la mort les unissait ! cette idée les console , les rassure. Où ils ne voient plus de séparation, la mort a dis- paru ; l'illusion s'achève; ils osent s'en flatter ; et dans l'égarement de leur doulein- , ils se pro- mettent un miracle, n'en connaissant pas de plus impossible que de vivre séparés, il appi-ochc^ toutefois, cet instant redoutable: c'est jM. de la Curne dont la saule cliaucelante aimonce la lin prochaine. On tremble, on s'attendrit pour M. de Sainte-Palayc : c'est à lui que l'on court, dans le danger de son frère. Tous les cœurs sont émus ; leurs amis, leurs connaissances , quiconque les a vus, tous en ])arlent, tous s'en occupent : le feu roi (car une telle amitié devait parvenir jusqu'au

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