Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t1.djvu/383

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ciété d’honnêtes gens choisis pour arbitres, faites en la matière d’un procès en justice réglée. Tout procès peut se perdre ou se gagner, et il n’y a pas plus à parier pour que contre ; de même, toute opinion, toute assertion, quelque ridicule qu’elle soit, faites-en la matière d’un débat entre des partis différens dans un corps, dans une assemblée, elle peut emporter la pluralité des suffrages.

— C’est une vérité reconnue que notre siècle a remis les mots à leur place ; qu’en bannissant les subtilités scolastiques, dialecticiennes, métaphysiques, il est revenu au simple et au vrai, en physique, en morale et en politique. Pour ne parler que de morale, on sent combien ce mot, l’honneur, renferme d’idées complexes et métaphysiques. Notre siècle en a senti les inconvéniens ; et, pour ramener tout au simple, pour prévenir tout abus de mots, il a établi que l’honneur restait, dans toute son intégrité, à tout homme qui n’avait point été repris de justice. Autrefois, ce mot était une source d’équivoques et de contestations ; à présent, rien de plus clair. Un homme a-t il été mis au carcan ? n’y a-t-il pas été mis ? voilà l’état de la question. C’est une simple question de fait, qui s’éclaircit facilement par les registres du greffe. Un homme n’a pas été mis au carcan : c’est un homme d’honneur, qui peut prétendre à tout, aux places du ministère, etc. ; il entre dans les corps, dans les académies, dans les