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Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t4.djvu/11

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DE CHAMFORT

graves, touchantes et passionnées, telles à peu près que l'hymne des Persans, qui est rapportée par Chardin, et qu'on trouve distribuée en sept chants, composée en l'honneur de Mahomet et d'Ali, avec des pensées et des sentiment qui ont quelque chose de l'esprit tragique. Aussi les poètes se lassèrent-ils à la fin de ces éloges bachiques, qui apparemment devenaient froids, comme les louanges réitérées sur le même sujet, et qui d'ailleurs tournaient plus au profit des prêtres de Bacchus, qu'au plaisir des spectateurs.

L' un de ces poètes (ce fut Thespis) eut la hardiesse d' y changer quelque chose, et eut le bonheur de réussir. Il s' avisa d'interrompre le chœur par des récits, sous prétexte de se délasser: cette nouveauté réussit.

Mais qu' était-ce que ces récits? L' unique auteur qu' il introduisait, jouait-il seul une tragédie? il est visible que non point de tragédie sans dialogue, et point de dialogue sans deux interlocuteurs, pour le moins.

Je me figure que Thespis, sur l' idée d' Homère, dont on récitait les livres dans la Grèce, crut que des traits de l' histoire ou de la fable, soit sérieux, soit comiques, pourraient amuser les Grèce il barbouillait même ces acteurs de lie, dit Horace, pour les rendre plus semblables à des satyres; et il les promenait dans des chariots, d' où il disait souvent des paroles piquantes aux passans: voilà l' origine des tragédies satiriques. Mais il y avait