Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t4.djvu/314

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ACTE 5 SCENE 1


le théâtre représente l’intérieur de l’enceinte
sacrée ; Nessir et les gardes au fond du
théâtre ; le prince sur le devant, et assis au
commencement du monologue.


Le Prince, seul.


L’excès du désespoir semble calmer mes sens.
Quel repos ! Moi des fers ! ô douleur ! ô tourmens !
Sultane ambitieuse, achève ton ouvrage,
joins pour m’assassiner l’artifice à la rage ;
à ton lâche visir dicte tous ses forfaits.
Le traître ! Avec quel art, secondant tes projets,
de son récit trompeur la perfide industrie
du sultan par degrés réveillait la furie !
Combien de ses discours l’adroite fausseté
a laissé, malgré lui, percer la vérité !
Ce peuple consterné, ce silence, ces larmes
qu’arrache ma disgrâce aux publiques alarmes ;
ce deuil, marque du sceau de la religion,
c’était donc le signal de la rebellion ;
hélas ! Prier, gémir, est-ce trop de licence ?
Est-on rebelle enfin pour pleurer l’innocence ?
Et le sultan le craint ! Il croit, dans son erreur,
aller d’un camp rebelle appaiser la fureur !