Page:Champollion - Panthéon égyptien, 1823.djvu/48

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même chapelle (ναὸς) que le dieu Phtha, reçoit de riches offrandes[1] ; et les monuments de Dendéra[2] prouvent que son culte se conserva ailleurs qu’à Memphis, sous les Lagides et sous les empereurs romains.

C’est comme emblème de la force protectrice du pays, que des statues colossales de Néith guerrière à tête de lion furent érigées devant les palais et les édifices sacrés de l’Égypte, et semblaient en interdire l’entrée aux profanes, aux ennemis des lois civiles et religieuses. Ces colosses, souvent en très-grand nombre, et presque tous de granit, montrent la déesse sous la figure d’une femme à tête de lionne ; elle est quelquefois debout, mais plus ordinairement assise sur un trône ; une étroite et longue tunique la couvre à partir du sein, qui reste nu ; ses bras, ses poignets et ses pieds sont ornés d’anneaux plus ou moins riches ; ses mains tiennent l’emblème de la vie divine, et le long sceptre, terminé par une fleur de lotus, particulier aux déesses égyptiennes. Mais comme Néith était une divinité douée des deux sexes, Ἀρσενόθηλυς[3], ἄρσην μὲν καὶ θῆλυς ἔφυς[4], le sculpteur lui a donné quelquefois le sceptre des dieux mâles, à tête de coucoupha. La tête de lionne est toujours surmontée du disque décoré de l’uræus royal.

On a depuis quelques années transporté en Europe un nombre considérable de ces statues de Néith-Conservatrice. Celles d’entre elles qui figurent la déesse assise, portent sur le devant du trône des dédicaces qui nous font connaître le nom des rois sous le règne desquels ces colosses furent placés sur les dromos ou devant les propylées dont ils formaient la décoration. Le Musée royal de Paris en possède plusieurs qui remontent aux temps des pharaons Aménophis II, Ramsès-le-Grand et Sésonchis. On en voit d’autres de l’époque du premier de ces princes à Rome, dans la salle égyptienne du Vatican. Le Musée royal de Turin en possède quatre du même règne, et l’on peut y admirer aussi une Néith-Léontocéphale assise, en granit, de huit pieds de hauteur, et d’un très-beau travail, portant une dédicace du règne de Ramsès VII, fils de Ramsès-le-Grand.

  1. Description de l’Égypte, A., vol. V, planche 49, no 4.
  2. Décoration intérieure de la porte du Nord ; Descrip. de l’Égypte, A., vol. IV, pl. 5.
  3. Horapollon, Hieroglyph., liv. 1er, no 13.
  4. Hymnes orphiques, éd. d’Herman, no  XXI.