Page:Champsaur - Homo-Deus, Ferenczi, 1924.djvu/30

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de leurs vices, et même de leurs amours, ne m’incite pas à chercher dans la fréquentation des hommes une source de plaisirs. Mais tu as eu tort de partir, Marc, car il y avait... il y a autre chose.

— Quoi donc, Jeanne ?

— La science, la recherche du grand mystère de la vie et de la mort !... Ah ! si tu savais quelles émotions nous avons ressenties, ici, parfois... Quelles minutes incomparables nous avons vécues ?...

Vanel eut un sourire étrange :

— Qui te dit, Jeanne, que je n’aie pas, moi-même, vécu des instants inoubliables ?

Elle le regarda longuement, puis elle fit :

— En effet, pourquoi ta merveilleuse intelligence se serait-elle reposée ?... Avec toi, sait-on jamais ?... Marc, tu as appris, peut-être, plus de choses que nous-mêmes...

Il ne répondit pas. Son œil fixait un rayon de soleil qui caressait la feuille d’un nénuphar, sur l’eau glauque du bassin : ce baiser de lumière posait comme une goutte d’or en fusion sur une gigantesque émeraude.

Ce jardin ressemblait, en cette fin de jour, à une forêt de contrée lointaine, troublante évocation d’un coin de paradis inculte. Un faisan passa dans les branchages des arbres hauts, au-dessus des herbes sauvages des anciennes pelouses ; et comme il avait un plumage brillant, on aurait dit un oiseau des Iles, une bestiole fabuleuse suscitant les tropiques, des terres vierges au delà des mers.

Tous maintenant se taisaient, et Marc Vanel contemplait Jeanne comme on étudie une énigme, car la fille du docteur Fortin était, au physique, un extraordinaire et déroutant chef-d’œuvre. A vingt-sept ans, c’était une fleur de chair divinement épanouie. Belle, avec d’abondants et courts cheveux blonds, dorés comme du soleil, coupés sur la nuque, à la garçonne, des lèvres rouges, un corps plutôt grand, aux formes pleines, aux