Page:Chapman - Les Fleurs de givre, 1912.djvu/95

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Et les amoureux voient quelquefois dans leurs rêves
De doux fantômes blonds descendre sur les grèves.

Les longs cris du hiboux troublent seuls leur sommeil.

Chaque matin, levés bien avant le soleil,
Les vigoureux draveurs baisent leur scapulaire
Et récitent tout bas quelques mots de prière,
Demandant à Celui qui veille sur les flots
Et protège flotteurs, pêcheurs et matelots,
D’écarter le péril qui toujours les menace.
Puis, vite, chacun court se rasseoir à sa place
― On dirait qu’ils ont peur d’arriver en retard ―
Autour de la marmite où bout la fève au lard.

Sitôt qu’ils ont mangé, regagnant la rivière,
Où l’aube à peine épand sa tremblante lumière,
Les travailleurs, joyeux, reprennent le levier.
Et les voilà roulant encor sur le gravier,
Sur les roches, parmi les joncs, le foin sauvage,
Les troncs d’arbres venus s’échouer au rivage.

Le flottage sera terminé dans trois jours.
L’équipe vient d’atteindre un des brusques détours
De l’Etchemin. Tout près, un long rapide écume