Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/289

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Engels acheminent le prolétariat à un chaos de barbarie et d’impuissance, ou ils prévoient qu’après les premiers actes politiques et économiques qui auront donné à la classe ouvrière un grand essor et marqué d’un sceau socialiste la démocratie, il se confondra de nouveau dans la vie nationale et dans la légalité du suffrage universel. Mais qu’est-ce à dire ? Et si la démocratie n’est point préparée au mouvement communiste, ne va-t-elle point contrarier, au lieu de les étendre, les effets des premières mesures dictatoriales du prolétariat ? Et si au contraire la démocratie y est préparée, si le prolétariat peut, par la seule force légale, obtenir d’elle qu’elle développe dans le sens communiste les premières institutions révolutionnaires, c’est en réalité la conquête légale de la démocratie qui devient la méthode souveraine de Révolution. Tout le reste, je le répète, n’est que l’expédient, peut-être nécessaire un moment, d’une classe encore débile et mal préparée. Mais ceux des socialistes d’aujourd’hui qui parlent encore de « dictature impersonnelle du prolétariat » ou qui prévoient la prise de possession brusque du pouvoir et la violence faite à la démocratie, ceux-là rétrogradent au temps où le prolétariat était faible encore, et où il était réduit à des moyens factices de victoire.

En fait, la tactique du Manifeste, qui consiste