Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/426

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1789. La bourgeoisie industrielle est restée vivante. Elle suit les lois du progrès scientifique. Elle adopte sans cesse de nouvelles méthodes de production, elle renouvelle son outillage. Et même au point de vue de la lutte sociale, de la lutte des classes, elle renouvelle sa méthode de combat : l’invention des syndicats jaunes atteste qu’elle a des ressources de souplesse et d’audace. Quelle différence d’activité entre un grand prélat d’ancien régime et un grand capitaliste d’aujourd’hui ! Il en est, comme certains milliardaires américains, qui ont hérité de l’activité de Napoléon. Et en France même, dans des proportions plus modestes, la classe capitaliste est toujours en éveil. Ce n’est pas à des classes nonchalantes et assoupies, c’est à des classes agissantes, prévoyantes, hardies que le prolétariat doit arracher leur privilège. Comment le pourrait-il s’il n’a pas avec lui l’ensemble de la nation ? Si la masse de la nation lui est hostile, il sera écrasé. Et si elle est simplement défiante, les manoeuvres de la classe capitaliste ne tarderont pas à changer cette défiance en hostilité.

Ainsi, l’universelle trépidation de la vie moderne, l’universelle excitation des énergies ne permettent plus l’action décisive des minorités. Il n’y a pas de masse dormante qu’une impulsion vigoureuse puisse ébranler. Il y a partout des centres de force, qui