Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/569

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légales qui peuvent sortir de ce germe d’expropriation.


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La propriété individuelle résistait ; les habitudes, violentées par la loi d’expropriation, luttaient et rusaient. La clause de la Déclaration des Droits qui exigeait que l’indemnité fût préalable favorisait cette résistance des propriétaires. Ils chicanaient sur le chiffre de l’indemnité ; ils suscitaient procès sur procès, et à force d’artifices de procédure, ils parvenaient souvent à lasser l’État.

Mais voici qu’en 1831, une première brèche est ouverte au principe de l’indemnité préalable. La Révolution de Juillet put craindre un moment un assaut général de l’Europe contre-révolutionnaire. Il fallait créer à la hâte des moyens de défense, dresser sans délai des fortifications. Que fût-il advenu si les propriétaires, par des ruses d’avoué, avaient retardé les expropriations nécessaires ? La loi de 1831 décide que pour les travaux intéressant la défense nationale, l’État n’attendra pas que les conflits soulevés par les propriétaires sur le montant de l’indemnité soient réglés. Il pourra proclamer l’urgence et prendre possession des terrains dont il aura besoin ; l’indemnité sera réglée plus tard ; elle aura donc cessé d’être préalable.