Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome III, 1827.djvu/33

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à descouvrir ; car elle est si bien fardée et couverte du visage d’amitié, qu’il est mal-aisé de la discerner. Elle en usurpe les offices, en a la voix, en porte le nom, et la contrefaict si artificiellement, que vous diriez que c’est elle. Elle estudie d’agreer et complaire ; elle honore et louë ; elle s’embesongne fort, et se remuë pour le bien et service, s’accommode aux volontez et humeurs. Quoy plus ? Elle entreprend mesme le plus haut et plus propre poinct d’amitié, qui est de monstrer et reprendre librement. Bref, le flatteur se veust dire et monstrer superieur en amour à celui qu’il flatte. Mais au rebours n’y a rien plus contraire à l’amitié que la medisance, l’injure, l’inimitié toute ouverte : c’est la peste et la poison de la vraye amitié ; elles sont du tout incompatibles : (…). Meilleures sont les aigreurs et poinctures de l’amy que les baisers du flatteur : (…). Parquoy pour ne s’y mescompter, voyci par sa vraye peincture les moyens de la bien recognoistre, et remarquer d’avec la vraye amitié. 1 l