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LIVRE DEUXIÈME

avec le malade ; elle insiste pour que sa fille accepte une cassolette de lui, et sa fille la refuse avec dédain. On peut lire là-dessus une excellente leçon de M. Ampère. Mais à mesure que l’on approche de la fin du cardinal, l’admiration de madame de Sévigné baisse, parce que ses espérances diminuent. Légère d’esprit, inimitable de talent, positive de conduite, calculée dans ses affaires, elle ne perdait de vue aucun intérêt, et elle avait été dupe des intentions testamentaires qu’elle supposait au coadjuteur.

Joly, la duchesse de Nemours, La Rochefoucauld, madame de Sévigné, le président Hénault et cent autres, ont écrit du cardinal Retz : c’est l’idole des mauvais sujets. Il représentait son temps, dont il était à la fois l’objet et le réflecteur. De l’esprit comme homme, du talent comme écrivain (et c’était là sa vraie supériorité), l’ont fait prendre pour un personnage de génie. Encore faut-il remarquer qu’en qualité d’écrivain il était court comme dans tout le reste : au bout des trois quarts du premier volume de ses Mémoires, il expire en entrant dans la raison. Quant à ses actions politiques, il avait derrière lui la puissance du parlement, une partie de la cour et la faction populaire, et il ne vainquit rien. De-