Page:Chateaubriand - Vie de Rancé, 2è édition, 1844.djvu/78

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
62
VIE DE RANCÉ

Montbazon apportée à la Trappe par l’abbé de Rancé et conservée dans la chambre de ses successeurs. »

Enfin, les indications des poètes ne sont pas à négliger. La muse n’a pas manqué aux traditions de la Trappe : madame de Tencin, née en 1681 (et qui par conséquent avait vécu dix-neuf ans contemporaine de Rancé), écrivit les mémoires du comte de Comminges, à travers lesquels passent des souvenirs : madame de Montbazon est changée en cette Adélaïde, solitaire mystérieux qui se fait reconnaître à l’ardeur avec laquelle il creuse son tombeau. Qui avait donné naissance à ce genre d’idées ? Ce sont là d’autres ressorts que les inventions forcenées et les idées difformes qui font maintenant des contorsions dans les ténèbres. Le nom de Comminges est emprunté de celui de l’évêque avec lequel Rancé se promenait sur les Pyrénées. Il arrive souvent qu’on rappelle les personnages étrangers pour cacher des rapports directs ; un nom qui tourmente la mémoire s’y glisse sous mille déguisements. On a une aventure contée par Maupeou, de deux frères épris de la même femme, et qui après s’être battus vécurent plusieurs années à la Trappe sans se reconnaître ; on a une romance de Florian sur Lainval