Page:Chaucer - Les Contes de Canterbury.djvu/116

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cette nuit-là, ni comment les Grecs jouèrent
2960les jeux funèbres, je ne tiens pas à le dire ;
ni qui mieux lutta tout nu et oint d’huile,
ni qui mieux s’évertua sans nulle défaillance.
Je ne veux pas dire non plus comment ils revinrent
chez eux à Athènes quand les jeux cessèrent ;
mais je veux vite aller à la conclusion
et finir ma longue histoire.

Avec le cours et la longueur des ans
ont passé le deuil et les pleurs.
Entre les Grecs par un accord commun
2970se tint, il m’a semblé, un parlement
à Athènes à propos de certains cas et questions ;
et entre autres points on parla
d’avoir avec certains pays alliance,
et des Thébains la pleine obéissance.
À quelle fin le noble Thésée aussitôt
envoya querre le gentil Palamon,
qui ne sut quelle était la cause et pourquoi ;
mais dans ses noirs vêtements, le cœur marri,
il vint en hâte à son commandement.
2980Puis Thésée envoya querre Émilie.
Quand ils furent assis et qu’on eut fait silence,
et que Thésée eut tardé un moment,
avant qu’un mot sortit de sa sage poitrine,
il jeta les yeux où il lui plaisait,
et, le visage triste, soupira doucement,
et puis en ces mots il dit sa volonté :

« Quand[1]là-haut le premier créateur des choses
fit au commencement la belle chaîne d’amour,
grande fut l’œuvre et haute sa pensée.
2990Il savait bien pourquoi et ce qu’il méditait ;
car avec cette belle chaîne d’amour il lia
le feu, l’air, l’eau et la terre
en des liens sûrs pour qu’ils ne puissent fuir.
Ce même prince et ce créateur (ajouta-t-il),

  1. Ce discours de Thésée est fait de trois passages de Boèce, lib. II, met. 8 ; lib. IV, pr. 6 et lib. III, pr. 10.