Page:Chaucer - Les Contes de Canterbury.djvu/135

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au lit où le charpentier soulait dormir.
C’est là qu’il y eut fête et chansons !
Et ainsi Alison et Nicolas passent la nuit
à leurs joyeuses et plaisantes besognes
jusqu’à ce que la cloche de laudes se mit à sonner
et que les moines au chœur se missent à chanter.


    Le clerc de la paroisse, l’amoureux Absalon,
qui toujours souffre si grande peine d’amour
fut le lundi à Oseneye,
3660en compagnie, pour s’ébattre et jouer,
et s’enquit, l’occasion s’offrant, auprès d’un cloîtrier,
secrètement de Jean le charpentier.
L’autre l’entraîna à part hors de l’église,
disant : « Je n’en sais rien, je ne l’ai vu ici travailler
depuis samedi, je crois qu’il est parti
chercher du bois où notre abbé l’a envoyé ;
car il a coutume d’aller chercher du bois
et de rester à la ferme un jour ou deux ;
ou bien il est chez lui, c’est certain :
3670mais en quel des deux lieux il est, je ne le saurais dire, »
Notre Absalon fut plein de joie et d’allégresse
et il pensa : « Voici le moment d’être sur pied toute la nuit
car sûrement je ne l’ai point vu bouger
devant sa porte depuis le point du jour.
Et, sur mon salut, j’irai, au chant du coq,
frapper tout discrètement à la fenêtre
qui est tout au bas du mur de sa chambre.
Lors dirai-je à Alison toutes
mes peines d’amour, car je ne puis manquer
3680à tout le moins de lui prendre un baiser.
J’aurai, par ma foi, quelque soulagement ;
la bouche m’a démangé tout le jour,
c’est signe de baiser pour le moins.
Toute la nuit aussi j’ai rêvé que j’étais à un festin[1] ;
je vais donc aller dormir une heure ou deux,
et puis toute la nuit je veillerai et m’ébattrai. »

  1. Ce qui était signe de joie.