Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/102

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

peut-être n’a-t-il plus toute sa tête. Autrefois, il savait à merveille ce qu’il voulait, il ne le sait plus. J’en suis désolé, car je l’aime beaucoup, et, si son esprit s’est affaibli, je lui pardonne de grand cœur toutes les énormités qu’il a pu me dire. »

Il ne sut plus que penser quand, au bout d’une semaine, un matin qu’il pleuvait à verse, il vit entrer dans son cabinet de travail M. de Miraval, l’air mélancolique et sombre, le front nuageux, l’œil éteint.

« D’où sortez-vous, mon oncle ? lui cria-t-il.

— Et d’où sortirais-je, si ce n’est de mon hôtel ? répondit le marquis.

— Mais vous l’avez quitté depuis huit jours.

— Je parle de l’hôtel de Beau-Rivage, situé au bord du lac, à Ouchy, port de Lausanne, où je me suis installé depuis que j’ai pris l’hôtel Gibbon en déplaisance.

— Je sais très bien, dit Horace, que l’hôtel de Beau-Rivage est à Ouchy, et je n’ignore pas non plus qu’Ouchy est le port de Lausanne. Ce que je ne sais pas, par exemple, c’est pourquoi vous avez changé de domicile sans daigner m’en avertir.

— Mille excuses, mon garçon. Je suis si occupé !

— A quoi donc ?

— C’est mon secret.