Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/193

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je ne les connais pas. Ce sont d’affreux scélérats, voilà qui est dit. Qu’est-ce que ça te fait ?

« Je lui arrachai son journal des mains, je le roulai en pelote, je le jetai bien loin dans le gazon. Il fut sur le point de se fâcher, il me montra les dents ; mais il se ravisa, il changea de visage, il me dit :

« — Ma parole d’honneur, tu as raison… Qu’ils fassent ce qui leur plaira. Qu’est-ce que ça me fait ?

« — Rien du tout, lui dis-je.

« — Absolument rien. Je t’adore, j’ai une faim de loup, et nous allons déjeuner.

« Il se pencha vers moi, me regarda fixement à travers la table :

« — Tu as les plus jolis cheveux bruns, la plus jolie bouche du monde, et ces cheveux bruns comme cette bouche sont à moi, à moi tout seul. Et, au coin de la joue, tu as une fossette ; elle est aussi à moi.

« Il ajouta, en remplissant son verre :

« — Je crois à la fossette de Rose Perdrix, et je crois au cœur de la fée Mêlimêlo. Et voilà tout. Quant au reste, je m’en… Ce n’est rien du tout que le reste, rien du tout.

« Il se mit à manger de grand appétit, à boire comme un Polonais. Je cherchai à le modérer, je