Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/312

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dans ses plumes. Les blocs de grès faisaient çà et là des taches de neige dans les feuillages. Le rocher de Marie-Thérèse ressemblait à un sphinx accroupi, qui propose des questions aux passants et qui les mange, quand ils répondent de travers. Rochers, arbres, chênes, genévriers, ils avaient tous cet air particulier aux choses qui ont longtemps vécu, qui ont un passé, des habitudes, des souvenirs, une histoire à raconter, et sur lesquelles les siècles ont usé leur lime et les tempêtes leurs fureurs.

Quoique M. Drommel considérât l’admiration comme une faiblesse coupable, il ne put se défendre d’un certain saisissement ; il observa pendant deux minutes ce site merveilleux, où le sauvage s’unit à la noblesse des formes, à la beauté des lignes, et qui, n’en déplaise à la lune et au prince de Malaserra, l’eût frappé bien davantage encore s’il l’avait vu de jour. Il se remit bien vite de son émotion ; il déclara que les forêts françaises manquent de cette intimité qui caractérise le moindre bocage allemand, que les chênes français ont toujours un air apprêté, un peu poseur, qu’on ne trouve qu’en Allemagne des arbres parfaitement naturels, qui aient du Gemüth. Il ajouta aimablement qu’il était du reste enchanté de sa petite