Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/38

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serai à jamais reconnaissante. Vous ferez entendre raison à ce cher enfant.

— Ma chère Mathilde, je relis quelquefois mes poètes latins. J’en connais un qui a dit que le propre de l’amour est de déraisonner, et que prêcher la raison à un amoureux, autant vaut lui demander d’extravaguer avec sagesse, ut cum ratione insaniat.

— Horace a du cœur. Vous lui représenterez que ce mariage me réduirait au désespoir.

— Il s’en doute, ma chère, puisqu’il n’a pas osé venir t’embrasser en arrivant d’Égypte, et sois sûre qu’il ne viendra pas avant que tu lui aies donné ton consentement. On a beau aimer et respecter sa mère, quand un homme est vraiment allumé… Et il l’est bien, juste ciel ! Sa lettre en fait foi ; c’est une prose qui sent la fièvre et qui brûle le papier. »

Mme de Penneville s’approcha du marquis, caressa doucement ses cheveux blancs, et lui passant ses bras autour du cou :

« Vous êtes si habile ! vous avez l’esprit si délié ! On assure que vous avez rempli autrefois des missions infiniment délicates, dont vous vous êtes acquitté à votre gloire.

— Câline, négocier avec un gouvernement est