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LE COLPORTEUR

eu le culte de la vérité, cela peut paraître paradoxal, et pourtant il n’est pas niable que la plupart des aventures mondaines et des bruits de coulisse dont il s’est fait le gazetier complaisant — le Colporteur, — sont scrupuleusement exacts . Quelques-uns de ces derniers se peuvent même contrôler sur les mémoires des contemporains et les rapports de police. N’allez pas croire, après cela, qu’une clé soit facile à établir pour un tel ouvrage. La malignité, ou quelque reste de prudence de l’auteur, a si bien brouillé et les événements et les personnages mis en cause, qu’il règne dans l’ensemble du récit une sorte de confusion, je dirai presque de mystère impénétrable. Mais on le sait, le mystère est la ressource des écrivains embarrassés.

On a dit la vie d’Antoine Chevrier et, certain jour, nous nous sommes fait un peu son biographe (i). Mais qu’en savons-nous auprès de ce que nous en voudrions savoir ? Tout, dans son singulier destin est digne d’éveiller et de rebuter, en même temps, la curiosité du chercheur. Ce bavard intarissable s’est si bien gardé de nous révéler sa propre histoire que, sur sa fin, les ténèbres planent ainsi que sur l’origine de ses historiettes.

Nous ne savons même point s’il se fit pamphlétaire par nécessité plus encore que par vertu. Rien, ou presque rien de ses aventures galantes ne transparaît dans ses écrits. Pourtant, l’on devine que l’amour fut surtout sa grande affaire.

Il le chercha en tous lieux, dans tous les pays, alors que traqué par les divers pouvoirs contre lesquels il avait exercé sa verve insolente, il fuyait sa patrie et ses créanciers. Lui fut-il — cet amour — plus miséricor-

(i) Contes et Facéties galantes, v* série. (Paris, Louis-Michaud, s. d., in-16.)