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14 LE COLPORTEUR

Libraire Bassompierre avoit déjà assuré la dot de deux de ses filles sur le produit des Ouvrages admirables de If. le Marquis de Caraccioli, tandis que le premier Éditeur de Don-Quichotte est mort à l’hôpital. Bizarrerie singulière qui n’annonce que trop la corruption du bon goût, et la décadence des lettres.

La Marquise revenue de son assoupissement, ouvrit un recueil de 72 Journaux qui paroissoient tous les mois pour la honte de la raison, l’ennui des lecteurs et la ruine des Libraires. Le Journal de Trévoux qu’elle parcourut, lui parut écrit passablement, mais elle trouva mauvais que l’auteur, s’érigeant indécemment en inquisiteur, prît les maximes de la saine philosophie pour des impiétés, et dénonçât à la Justice tous les écrivains qui avoient plus de réputation que lui. Montesquieu, Voltaire, Diderot, et tous les Encyclopédistes sont les victimes journalières que l’Écrivain de Trévoux immole à sa sainte fureur. Colorant ses injures sous le nom de zèle, et s’enveloppant dans le manteau de la Religion, il croit qu’il lui est permis de n’écouter que sa passion, et de jouer pour dix écus par mois le rôle de délateur, personnage peu digne d’un Prêtre, et moins encore d’un esprit politique, qui se tairoit, s’il réfléchissoit que ces philosophes qu’il attaque, n’ayant connu ni Jean Châtel, ni le Duc Daveiro, pourroient faire repentir la Société de Jésus, des persécutions qu’il leur suscite depuis près de sept ans.

La Marquise allant plus avant, ouvrit une brochure soporative, connue sous le titre de Journal du Commerce.

L’ex-avocat qui dirige cette production glacée, dit que son ouvrage est bon, il le croit même. Qu’en conclure ? que M. Accarias de Serionne, bourgeois de Gap en Dauphiné, dit et croit une absurdité. Mais je suis pension-