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LE COLPORTEUR 17

mots elle ouvrit ce Recueil qu’elle parcourt avec un plaisir malin, qui ne surprit point le Chevalier ; il devoit aimer un caractère qui étoit le sien.

Le premier portrait qui s’offrit aux regards de la Marquise, fut celui de Voltaire ; on lisoit au bas ce vers, tiré de la tragédie de Marianne :

J’ai des adorateurs, et n’ai pas un ami.

Celui de la Gaussin suivait (1) : sa figure marquoit une vieille dont la voix rauque étonnoit ; on voyait au-dessus ces vers qu’Orosmane prononce dans Zaïre :

.....Est-ce là cette voix

Dont les sons enchanteurs m’ont séduit tant de fois ?

Comme tout étoit mêlé dans ce Recueil, les héros s’y trouvoient souvent confondus avec les histrions, et il n’étoit pas surprenant de voir le portrait d’un grand nomme à côté de celui d’une petite femme : l’Image du Roi de Prusse frapoit le spectateur ; on voyoit cette inscription au bas :

Il sait vaincre à la fois et chanter ses victoires.

Le Portrait du célèbre Piron venoit immédiatement : les deux vers qui étoient au dessus, étaient de lui :

Cy gist qui ne fut rien, Pas même Académicien.

On lisoit au bas de celui de la petite Michû, dite Cameli, actrice du théâtre de Bruxelles, ce vers de Zaïre :

Tranquille dans le crime, et fausse avec douceur.

Le Maréchal D*** y étoit représenté, fixant sa montre, et disant ce mot :

J’attends .

(1) Jeanne-Catherine Gossem, dite Gaussin, de la Comédie-Française. Voyez plus loin, pp. 69 et 202.