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SOUS L’ŒIL DU PHARE

Ce coin de terre, il croyait ne lui avoir laissé que les misères de son enfance et les humiliations de sa jeunesse ; il se trompait. Il y était resté quelque chose de son cœur, dans la cendre des siens comme dans l’air qu’ils avaient aspiré, et dans tous ces endroits familiers qu’ils avaient longtemps animés de leur vie.

Avec tout ce qu’il aime sur la terre, il lui a donc rapporté sa richesse laborieusement acquise, mais ce n’est pas assez. Attendez ! Il lui donnera encore les derniers jours de sa vie ; parce que de tout ce qu’il y voit aujourd’hui se dégage comme un parfum d’idéalisme que l’on chercherait vainement ailleurs dans le même bien-être matériel, et qui prépare l’âme au surnaturel dont elle s’assoiffe aux approches de la mort.

Les éclats de voix des jeunes, la conversation animée des autres auprès de lui ne peuvent écarter de son esprit ces graves pensées.

— « Ne croirait-on pas, dit Émile, que nous avons oublié Jean dans la Miller Street ? Il est peut-être retourné à ses ate-