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CHAPITRE XXIV.

L’administration de l’hospice, désireuse de tirer de là quelques profits pour ses pauvres, proposa un tarif de droits à percevoir par l’Hôtel-Dieu, et la grande duchesse soumit elle-même le tout à l’approbation du duc d’Orléans, seigneur de Dourdan. Un acte du conseil du prince du 9 août 1696, en autorisant la foire, renvoyait par devant le roi pour l’obtention définitive, et c’est à son cousin Louis XIV que la duchesse de Toscane alla porter en personne la requête des Dourdanais. « Il ne falloit pas moins que l’autorité de cette grande princesse, écrivait un contemporain, pour obtenir du roy l’établissement de cette foire, car quoyque le roy Louis XIV, naturellement bon et remply d’attentions aux besoins de ses sujets, fût très-porté d’inclination à répandre ses libéralités royales, il aimoit néantmoins qu’on le sollicitât et qu’on luy fist connoistre l’utilité de la chose pour laquelle on lui faisoit sa requeste, et comme cette princesse étoit fort estimée du roy, il luy accorda tout ce qu’elle luy demanda, mais franche de tous droits, avec le privilége que quiconque viendrait de fort loing pour la foire de Saint-Félicien, ne pourroit estre arresté ny inquiété pour raison de ce qu’il pouvoit devoir jusqu’à ce qu’il fût rendu chez luy en prenant un temps suffisant pour faire son voyage et conduire les marchandises qu’il amenoit et ramenoit de la foire en toute surreté, sans aucune crainte qu’elles fussent saisies. » — Les lettres patentes signées du roi furent religieusement enfermées dans la châsse avec les reliques.

Pendant les trois jours que durait cette foire, il se faisait à Dourdan, dans « le champ de foire Saint-Félicien, » en face du jeu de paume, un grand commerce de chevaux et de bestiaux, et il venait de très-loin des marchands de toute espèce : fripiers, toiliers, bijoutiers et quincailliers, qui disputaient aux bateleurs et baladins l’argent et la curiosité des paysans. Nos pères, plus naïfs que nous, saisissaient avec empressement cette occasion d’innocents spectacles, de réunions de famille et de simples réjouissances qui avaient bien leurs charmes. Ce qui attirait aussi un nombre considérable de cultivateurs, c’était l’achat des blés de semence qui avaient eu de tout temps une grande réputation à Dourdan, au dire de de Lescornay.

La foire Saint-Félicien et la foire Saint-Laurent subsistent toujours ; mais, ainsi que toutes les foires d’aujourd’hui, elles ont perdu, comme fêtes, une partie de leur vogue et de leur éclat.

Comme foire de bestiaux, la plus importante maintenant à Dourdan est la foire Ventôse, foire nouvelle qui date du commencement du siècle et se tient tous les ans le 23 février. On peut voir ce jour-là environ vingt mille moutons parqués au dessus de la ville, des troupeaux de vaches au Jeu de paume, plusieurs centaines de chevaux attachés aux parapets des fossés, et dans toute la ville un mouvement d’affaires considérable[1].

  1. Cette foire portait aussi le nom de Foire-Lambert, du nom du sieur Lambert, qui avait été un des promoteurs de son institution.