Page:Chronique d une ancienne ville royale Dourdan.djvu/361

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
345
DOURDAN AU XIXe SIÈCLE.

moitié pour les réparations de l’église. La reconnaissance des Dourdanais pensa quelques instants se traduire par un monument commémoratif de ce passage, mais le projet demeura sans exécution[1]. — C’est vers cette époque que le mouvement industriel dû à l’initiative de M. Lebrun atteignit son apogée.

De 1808 à 1813, maire une première fois, M. Demetz, avocat, enfant de Dourdan, fut témoin des brillantes années de l’empire, des journées de réjouissances et de victoire, mais aussi des hécatombes sanglantes et des dures levées d’hommes qui coûtèrent à Dourdan plus d’un sacrifice.

Un ancien nom, au service du pouvoir nouveau, fit revivre pour Dourdan les souvenirs du siècle passé. Le marquis de la Brousse de Verteillac, officier de la Légion d’honneur, chambellan de l’empereur, fut nommé maire en 1813. La mémoire de sa famille était toute vivante encore. Le Parterre, qu’il avait dû vendre par actions en 1809, était toujours sa demeure. Dourdan, durant de tristes jours, lui dut peut-être son salut. En effet, le territoire était envahi deux fois en quinze mois par l’étranger. Plus d’un demi-siècle a passé sur ce souvenir et n’a pas suffi pour l’effacer. Paris avait capitulé le 3 mars 1814. Le 2 avril, à la chute du jour, trois hussards prussiens traversèrent Dourdan au galop, de la porte de Paris à la porte de Chartres. Une impression de douloureuse terreur s’empara des habitants, et plus d’un homme mûr d’aujourd’hui se souvient d’avoir vu son père enfouir alors, dans quelque coin de la cave ou du jardin, l’argent de la famille. Le lendemain soir, dimanche 3 avril, une troupe de Cosaques parut à son tour. Des tentes se dressèrent autour de la ville et l’on vit successivement quatre à cinq cents Russes de la garde impériale campés près de Saint-Laurent ; l’artillerie prussienne stationnant avec ses pièces au Jeu de Paume, des bivouacs organisés en face du Parterre, sur la route et sur la plaine de Liphard ; six mille cavaliers anglais passant à la fin de juin, et la cavalerie russe défilant au son d’une musique sauvage. On jugera de la fermeté et de la prudence que dut déployer l’autorité locale, quand on saura que, durant tout ce temps, la ville était pleine de soldats français logés dans toutes les maisons et dont la moindre susceptibilité eût pu amener une collision terrible.

Partie d’Orléans pour se rendre à Rambouillet et de là en exil, l’impératrice Marie-Louise, accompagnée du roi de Rome, traversa Dourdan. Son équipage, entouré de cinquante cosaques couverts de haillons, s’arrêta sur la place devant le château et à la poste aux chevaux, rue de Chartres. La foule se pressa, respectueuse et émue, autour de la voiture. Le roi de Rome, debout à la portière, embrassa quelques enfants de son

  1. Il était question d’élever une pyramide sur la place du marché. La dépense était estimée 3,000 fr. Un modèle en charpente demeura longtemps sur la place, et un commencement de souscription monta à 593 fr. 16 c. — Archives de la mairie.