Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 2, 1864.djvu/480

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HOMÉLIE SUR LAZARE.



DEUXIÈME HOMÉLIE.

ANALYSE.


Saint Chrysostome, ayant remarqué que le parallèle du mauvais riche avec le pauvre Lazare avait produit un bon effet sur le peuple, le continue dans le discours suivant. – Il commence par détruire une erreur populaire venue des païens, selon laquelle ceux qui mouraient de mort violente devenaient des démons. – Si Jésus-Christ appelle les Juifs fils du diable, c’est qu’ils irritaient les œuvres du diable ; c’est par le péché et non par la mort violente que les hommes peuvent devenir semblables au démon. – Description touchante de la mort du pauvre Lazare et de celle du mauvais riche – Dureté de celui-ci opposée à la charité d’Abraham. – Loi de l’aumône. – Un pauvre a-t-il besoin de pain, il faut lui en donner, fût-il le plus méchant des hommes.
1. J’ai admiré votre charité, lorsque tout récemment je parlais de Lazare ; je l’ai admirée en vous voyant d’une part applaudir à la résignation du pauvre Lazare, et de l’autre détester la cruauté inhumaine du riche : voilà des indices non équivoques d’une – âme généreuse. En effet., lors même que nous ne pratiquerions pas la vertu, nous arriverons certainement à la pratiquer, si nous savons l’estimer et la louer ; et lors même que nous ne fuirions pas le vice, nous arriverons certainement à le fuir, si nous savons le blâmer. Donc, puisque vous avez accueilli mes paroles avec ces dispositions excellentes, je vais vous expliquer le reste de la parabole. Naguère, vous avez vu Lazare à la porte du riche, aujourd’hui voyez-le dans le sein d’Abraham ; vous l’avez vu entouré et léché parles chiens, voyez-le escorté par les anges ; naguère vous l’avez vu dans la pauvreté, voyez-le dans les délices ; vous l’avez vu souffrant la faim, voyez-le dans l’abondance de toutes choses ; vous avez vu ses combats, voyez sa couronne ; vous avez vu ses travaux, voyez sa récompense ; voyez-le, riches et pauvres : riches, afin que vous n’estimiez pas trop la richesse sans la vertu ; pauvres, afin que vous ne regardiez pas la pauvreté comme un mal : aux uns comme aux autres, Lazare donne une grande leçon. Si Lazare a enduré sa misère sans irritation, quelle indulgence mériteront ceux qui s’irritent au sein de l’opulence ? S’il rendit grâces à Dieu dans la faim et dans tous les maux qui l’affligeaient, quelle excuse allégueront ceux qui dans leur abondance ne veulent pas s’acquitter de ce devoir ? Enfin quel pardon obtiendront-ils, ces pauvres qui s’impatientent et se révoltent à cause de leur pauvreté, tandis que Lazare, traînant sa vie à la porte du riche dans la faim, dans la misère, dans l’abandon, dans une maladie qui ne le quitte pas, Lazare méprisé de tout le monde, Lazare ne pouvant voir personne qui partageât ses souffrances, Lazare nous apparaît si parfaitement sage et résigné ?
Apprenons de lui à ne pas regarder tous les riches comme heureux, et tous les pauvres comme malheureux. Bien plus, s’il faut dire la vérité, le vrai riche n’est pas celui qui a beaucoup