Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 2, 1864.djvu/538

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je, les récompenses ne le sont pas moins. Car, dit Abraham, un grand abîme a été creusé pour toujours entre nous, c’est-à-dire, les justes, les hommes vertueux, ceux qui ont mérité de partager notre sort, et vous, c’est-à-dire ceux qui ont consumé leur vie dans le vice et la méchanceté. Et cet abîme est tellement grand que pas un de ceux qui sont ici ne peut aller à vous ni venir à nous de là où vous êtes. Remarquez-vous la grandeur de l’abîme ? Comprenez-vous cette réponse plus terrible que l’enfer ? Dès le principe, en entendant parler de la prospérité du riche, des prévenances que tout le monde avait pour lui, des gardes qui l’escortaient, des délices dans lesquelles il se plongeait chaque jour, ne croyiez-vous pas qu’il était parfaitement heureux ? Au contraire, en voyant le pauvre couché à une porte et en proie à de cruels ulcères, ne pensiez-vous pas que sa vie était misérable ? Mais voici qu’au dénouement nous voyons la face des choses entièrement changée : celui qui se plongeait dans les délices et l’ivresse est maintenant sur des brasiers ardents ; et celui qui était en proie à la dernière indigence et à la faim est heureux dans le sein du patriarche.
Mais, pour ne pas donner à ce discours une longueur fatigante, il suffit de résumer ici notre enseignement et de vous exhorter, mes frères, à ne vous engager, ni dans la porte large, ni sur la voie spacieuse, et à ne pas rechercher en tout la volupté ; réfléchissez au terme de chacune des deux voies, fuyez celle-ci en songeant à ce qui arriva au mauvais riche et prenez avec empressement la porte étroite et la voie resserrée, afin que vous puissiez arriver, après les tribulations d’ici-bas, au séjour de la béatitude. Fuyez donc, je vous en conjure, les spectacles de Satan et les jeux pernicieux du cirque ; car c’est dans l’intérêt et pour le salut de tous ceux qui ont été attirés par leurs amorces et se sont dirigés vers la voie spacieuse que nous avons été amenés à dire ces choses, afin que, sachant ce qu’il en est, ils abandonnent cette voie, et que, s’engageant dans la voie resserrée, je veux dire celle de la vertu, ils soient jugés dignes, comme Lazare, du sein du patriarche, et qu’évitant tous ensemble le feu de l’enfer, nous soyons mis en jouissance de ces biens ineffables que l’œil n’a point vus et que l’oreille n’a point entendus. Puissions-nous tous les obtenir par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui, avec le Père et le Saint-Esprit, soient gloire, puissance, honneur, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
Cette Homélie et la précédente ont été traduites par M. l’abbé A. SONNOIS.