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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/172

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son début, connut, nous l’avons déjà dit. Et quel est ce début : « Louez le Seigneur parce qu’il est bon, parce que sa miséricorde s’étend dans tous les siècles. » Le Prophète avant présents à l’esprit les bienfaits dont le Seigneur a comblé toute la terre, sa bonté infinie et sa miséricorde qui éclatent en toutes choses, s’attache à faire ressortir la source de tant de biens « Que la maison d’Israël dise maintenant que le Seigneur est bon et que sa miséricorde s’étend dans tous les siècles (2). » Qu’est-ce que j’entends ? « La maison d’Israël » qui a souffert des captivités nombreuses, qui a servi en Égypte, qui a été emmenée aux extrémités de la terre, qui en Palestine a enduré des maux sans nombre ! Sans doute, me répond le Palmiste. Il n’y a point de meilleurs témoins de ces bienfaits et personne n’en a reçu de plus nombreux et de plus signalés. Bien plus, leurs épreuves mêmes sont une marque de son infinie bonté, et un examen un peu attentif prouvera qu’ils lui doivent de grandes actions de grâces pour la venue du Sauveur, car les maux dont elle a été pour eux la source doivent être attribués à leur malice et non à. Notre-Seigneur. En effet, c’est pour eux qu’il venait et il leur répétait souvent : « Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël (Mt. 15,24) », et à ses disciples : « N’allez point dans les terres des Gentils, mais plutôt aux brebis perdues de la maison d’Israël (Id. 10,5, 6) ; » et à la Chananéenne « Il n’est pas juste de prendre le pain des enfants pour le donner aux chiens. » (Ibid 15, 26) Toutes ses démarches, toutes ses actions se rapportaient donc à leur salut. S’ils parurent dans la suite indignes de ces bienfaits, c’est à leurs crimes et à leur ingratitude extraordinaire qu’il faut l’imputer. « Que la maison d’Aaron dise maintenant que le Seigneur est bon et que sa miséricorde s’étend dans tous les siècles (3). »
Le Prophète fait ici un appel spécial aux prêtres, afin qu’ils viennent chanter les louanges du Seigneur, montrant ainsi l’excellence du sacerdoce. Car, par cela même qu’ils étaient supérieurs aux autres ils reçurent de Dieu plus de gloire, non seulement par l’honneur du sacerdoce, mais dans bien des circonstances. Ainsi quand le feu sortit du Tabernacle (Lev. 10,2), ce fut à cause d’eux ; et la terre qui s’entr’ouvre (Nb. 16,32), et la verge qui fleurit (Id. 17,8), et tant d’autres prodiges ont lieu à cause d’eux et pour eux. « Que tous ceux qui craignent le Seigneur disent maintenant qu’il est bon, que sa miséricorde s’étend dans tous les siècles (4). » Car ce sont ceux-là principalement qui peuvent voir sa bonté et en toutes circonstances trouver les preuves de sa miséricorde. Que signifient ces paroles : « Sa miséricorde s’étend dans tous les siècles ? » C’est-à-dire due continuellement et sans interruption elle se montre avec éclat dans tous les événements. Il est vrai que ceux dont les yeux de l’âme sont trop faibles ou que quelques passions rendent malades, n’aperçoivent pas cette bonté et cette miséricorde, pas plus que ceux dont les yeux sont malsains ne peuvent contempler le soleil. Et ceux mêmes qui les ont bien disposés sont forcés de les détourner de sa splendeur. Ainsi en est-il de la Providence générale de Dieu dont la prudence et la sagesse sont si élevées qu’elles Font infiniment au-dessus de toute raison humaine. Ajoutez à cela mille cupidités qui, en nous rendant insensés, nous ôtent la vue et nous empêchent de l’apercevoir. La première est l’amour de la volupté qui fait passer par-dessus les choses les plus manifestes sans qu’on les découvre. La seconde est l’ignorance et le dérèglement de l’esprit. Si nous voyons un père châtier son enfant, nous l’approuvons, nous le louons même, et c’est à ce signe surtout que nous reconnaissons qu’il est père. Que Dieu veuille au contraire nous punir de nos mauvaises actions, nous ne le supportons pas, nous sommes indignés. Quelle absurdité ! quelle perversité comparable à celle-là, puisqu’elle nous fait révolter contre des choses tout à fait opposées et nous fait gémir ici de la présence du châtiment, là de son absence. Que l’on aperçoive des hommes qui volent, qui envahissent le bien d’autrui, on veut bien qu’ils soient punis. Quand il s’agit de ses propres fautes on raisonne tout autrement. Ce qui est l’indice d’un cœur dépravé et corrompu. La troisième, c’est le défaut de discernement de ce qui est bien d’avec ce qui est mal, ce qui fait porter des jugements faux ; ce défaut vient de ce qu’on est entièrement adonné au vice et qu’on se complaît dans le mal. La quatrième, le peu de connaissance qu’on a de la grandeur de ses fautes. Une cinquième cause de notre aveuglement, c’est la distance infinie qui se rencontre entre Dieu et les hommes. Il faut ajouter que Dieu ne veut pas tous les jours tout découvrir parce