Aller au contenu

Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/216

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

trouble et le désordre. Néanmoins, Dieu oublia tout cela, il l’appela, et daigna le combler de sa grâce. Et que dirons-nous de Pierre, lui qui occupe le premier rang ? Après des miracles et des prodiges sans nombre, après tant d’exhortations et d’avertissements Dieu ne le convainquit-il point d’avoir gravement failli ? Pourtant, Dieu oublia cela aussi, et il établit Pierre le prince des apôtres. Aussi lui dit-il : « Simon, Simon, voilà que Satan a cherché à te passer au crible comme le blé ; et moi j’ai prié pour toi afin que ta foi ne vienne pas à manquer. » (Lc. 22,31-32) Vous le voyez, si après tout cela Dieu n’usait de miséricorde et d’indulgence, s’il venait juger les hommes d’après un examen rigoureux, il les trouverait coupables tous absolument. C’est ce qui fait dire à saint Paul : « Ma conscience ne me reproche rien, mais je ne suis pas justifié pour cela (1Cor. 4,4) ; » et au Psalmiste : « Si vous considérez les iniquités, Seigneur, Seigneur ! » La répétition de ce dernier mot n’est pas l’effet du hasard : elle montre un homme saisi d’étonnement et d’admiration devant l’extrême miséricorde, l’immense majesté de Dieu, devant l’océan sans bornes de sa bonté. « Qui pourra résister ? » Le Psalmiste ne dit pas : Qui pourra échapper ? mais : « Qui pourra résister ? » On ne pourra même, veut-il dire, rester en la présence de Dieu. « Parce que c’est de vous que vient la propitiation (11). » Que signifient ces mots ? En voici le sens : Ce n’est pas en vertu de nos propres mérites, mais c’est grâce à votre bonté, qu’il nous est possible d’échapper au châtiment. En effet, si votre justice nous épargne, cela dépend de votre miséricorde. Si cette dernière nous est refusée ; nos propres actions ne suffiront pas pour nous soustraire à la colère à venir.
3. C’est ce que Dieu nous enseigne encore lorsqu’il dit par son Prophète : « C’est moi qui efface tes iniquités. » (Is. 43,25) C’est-à-dire, cela n’appartient qu’à moi, c’est le fait de ma bonté, de mon amour pour toi. De sorte que tes actions ne sauraient jamais suffire pour te mettre à l’abri du châtiment, si ma miséricorde n’y venait ajouter son œuvre. Et plus loin : « Je vous supporte (Is. 46,4) », dit-il encore. « A cause de votre nom, je vous ai a attendu, Seigneur. Mon âme a attendu l’effet de votre parole. » (Ps. 129,4) « Mon âme a espéré dans le Seigneur. » (Id. 5) Une autre version porte : « A cause de votre loi », et une troisième : « Afin que votre parole fût connue. » Dans tous les cas, voici le sens : à cause de votre miséricorde, à cause de votre loi, j’ai attendu mon salut ; car si je considérais ce qui dépend de moi, il y a longtemps que j’aurais perdu tout courage et tout espoir ; mais comme je songe à votre loi et à votre parole, j’en conçois de bonnes espérances. A quelle parole songe-t-il ? A la parole de la miséricorde divine. Car c’est ce Dieu qui dit : « Autant le ciel est distant de la terre, autant mes résolutions sont distantes des vôtres, et mes voies de vos voies. » (Is. 59,9) Et autre part : « Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant le Seigneur a affermi sa miséricorde sur ceux qui le craignent. » (Ps. 102,11) Et ensuite : « Autant l’orient est distant de l’occident, autant il a éloigné de nous nos iniquités. » (Id. 12) C’est-à-dire, je n’ai pas seulement sauvé ceux qui avaient fait de bonnes œuvres, mais j’ai épargné les pécheurs, et au milieu de tes prévarications j’ai fait paraître ma protection et ma sollicitude. Un autre interprète traduit : « Afin que vous soyez redouté, je vous ai attendu, Seigneur. » Redouté de qui ? de mes ennemis, de ceux qui me tendent des embûches et qui me baissent. Maintenant, que signifie : « A cause de votre nom ? » C’est-à-dire : Quoique je sois un pécheur, et sous le poids de misères sans nombre, cependant, je le savais, de peur que votre nom ne fût profané, vous ne nous auriez pas laissés périr. C’est ce que Dieu dit aussi dans Ézéchiel : « Ce n’est pas à cause de vous que je le fais, mais à cause de mon nom, afin qu’il ne soit pas profané parmi les nations. » (Ez. 36,22) Ce qui veut dire : par nous-mêmes, nous ne méritions pas d’être sauvés, et nous ne pouvions fonder aucune espérance sur nos actions ; mais nous attendons notre salut à cause de votre nom, et cet espoir nous est laissé. Dans une autre version nous lisons : « A cause de la crainte j’ai attendu le Seigneur. » Dans une autre : « A cause de la loi j’ai attendu le Seigneur. Mon âme a attendu l’effet de ta parole. » Dans une autre : « Mon âme a espéré en sa parole. » Et dans une autre : « Mon âme a attendu, et j’ai prêté l’oreille pour entendre sa parole. » C’est-à-dire, j’avais une ancre sainte qui m’était fournie par les déclarations et les promesses continuelles attestant sa miséricorde et sa