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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/293

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tie du monde ; car ce qu’il me faut, c’est une autre communion qui surpasse le ciel ; là est ce qui nous rapproche, et ce qui nous fait vivre. En effet, dit l’Apôtre : « Notre vie est cachée en Dieu avec Jésus-Christ. » (Col. 3,3) Nous n’habitons plus la terre ; mais nous nous sommes transportés dans la métropole d’en haut ; nous y avons une autre lumière, la vraie lumière, une autre patrie, d’autres concitoyens, d’autres parents. Et voilà pourquoi, disait Paul : « Vous n’êtes plus des étrangers, ni des voyageurs, mais vous êtes concitoyens des saints. » (Eph. 2, 19) Comment donc le Christ a-t-il pu dire que le samaritain était le prochain, lui séparé du peuple par un si grand intervalle ? (Lc. 10,36) Cela n’a pas été dit par rapport à la nature, cela signifie que lorsqu’il s’agit de bien à faire, il faut que tout homme soit pour vous le prochain ; mais quand il s’agira de la vérité, discernez quel est le prochain et quel est l’étranger. Vous avez beau avoir un frère du même père et de la même mère, s’il n’est pas en communion avec vous sous la loi de la vérité, qu’il soit plus étranger pour vous que n’importe quel scythe ou barbare. Et maintenant, si c’est un scythe ou un sarmate, mais qui possède la connaissance pleine et entière des dogmes, qui ait la même croyance que vous, il doit être plus votre parent que celui qui est sorti des mêmes flancs que vous. Et voilà comment nous distinguons le barbare de celui qui ne l’est pas ; nous ne consultons ni la langue ni l’origine, mais la pensée, mais l’âme. En effet, ce qui constitue l’homme avant tout, c’est l’observance pleine et entière des dogmes ; c’est la vie conforme à la sagesse.
4. Mais voyons maintenant la peinture que le Prophète présente de ces étrangers, quand il nous dit : « Sauvez-moi de la main des enfants étrangers, dont la bouche profère des paroles vaines, et dont la droite est une droite pleine d’iniquités (8). » Voyez-vous quels sont ceux qu’il appelle des étrangers ? Ceux qui vivent dans le crime, ceux qui aiment l’iniquité, ceux qui tiennent des discours insensés, qui ne disent rien d’utile. Reconnaissez donc les étrangers, à leurs discours, à leurs paroles. C’est ainsi que le Christ dit. « Vous les connaîtrez par leurs fruits. » (Mt. 12,16) En effet, de même qu’on donne aux soldats un grand nombre de signes pour se reconnaître, de telle sorte que si un combat a lieu pendant la nuit, ou si des tourbillons de poussière obscurcissent le jour et amènent les ténèbres, ou si quelque confusion ou perturbation arrive, ils ne soient pas exposés à prendre leurs compagnons pour leurs ennemis, ni les ennemis pour leurs compagnons ; de même le Prophète nous donne dans ce passage des signes pour nous permettre de distinguer le parent et l’étranger, à savoir leurs discours et leurs actions. « Dont la bouche profère des paroles vaines, et dont la droite est une droite pleine d’iniquités. » C’est qu’en effet nous avons à soutenir une guerre, une bataille, un combat nocturne des plus cruels ; les démons nous frappent ; nos passions nous tendent des pièges ; nos pensées se soulèvent contre nous. Il y a aussi, pour les initiés aux mystères, des signes de reconnaissance, et si nous voulons distinguer le profane de l’initié ces signes nous serviront.
« Dont la droite est une droite pleine d’iniquités. » Quoi de plus triste que de voir cette main, faite pour nous secourir, devenir un instrument de trahison ! En effet, si nous avons des mains, c’est pour nous préserver nous-mêmes et préserver les autres de l’injure ; c’est pour faire disparaître les crimes, c’est pour servir de port et de refuge à ceux qui subissent la violence et l’injustice. Quelle sera donc l’excuse de ceux qui se servent de ces armes, non pour le salut des autres, mais pour leur pro lire perte ? « Je vous chanterai, ô Dieu, un nouveau cantique (9). » Quel est encore ici l’enchaînement des pensées ? enchaînement parfait. Car le Psalmiste a dit : « Faites éclater votre main, et sauvez-moi », et dispersez-les, et il proclame qu’il saura reconnaître ce, secours en offrant une récompense inutile, il est vrai, à Dieu qui la recevra, mais très-avantageuse à l’homme qui l’offrira. Or, quelle sera cette offrande ? « Je vous chanterai, ô « Dieu, un nouveau cantique. » C’est bien peu de chose, si on compare ce don à la grandeur du bienfait. Mais le fidèle a donné tout ce qu’il, avait ; et nous aussi, nous ne demandons aux pauvres, à ceux qui ne possèdent rien, que le remerciement et la gratitude. Pour nous, ce que nous en faisons, c’est pour être glorifiés, Dieu, au contraire, n’a pas besoin d’être glorifié, mais il veut glorifier ceux qui le chantent, et trouver ainsi l’occasion de leur décerner de nouveaux bienfaits. « Je vous chanterai sur l’instrument à dix cordes », c’est-à-dire, je vous rendrai grâces. On avait alors des instruments