Aller au contenu

Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/298

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

terribles, et annonceront votre grandeur (6). »
Ces paroles montrent la plénitude de la puissance qui décerne les bienfaits et les châtiments ; elles montrent aussi, que toutes les merveilles énumérées sont ou des châtiments, ou des bienfaits. Et la preuve en est non seulement dans les événements d’alors, mais encore dans la nature même des créatures, lesquelles manifestent ce double caractère d’un pouvoir bienfaisant. Instruments destinés à porter la terreur, ainsi les éclairs, les tonnerres, les foudres, les tourbillons de feu, la peste, les neiges, la grêle, la nielle, la glace, les incendies, les inondations ; parmi les reptiles : les dragons, les scorpions, les serpents ; parmi les animaux qui volent, les sauterelles ; parmi les plus vils des êtres, la mouche des chiens, la chenille ; et ces instruments de douleur sont en même temps des instruments de la Providence, des instruments de conversion, pour secouer l’engourdissement, dissiper le sommeil, pour tirer l’homme de la léthargie, pour réveiller l’activité. Et non seulement dans ces êtres, mais dans leurs contraires aussi, éclate la perfection de la force qui les a produits. Aussi le Psalmiste, qui veut nous instruire de ces choses, après avoir dit : « Elles publieront la puissance de vos œuvres terribles, et annonceront votre grandeur », a-t-il ajouté : « Elles attesteront l’abondance de votre douceur (7). » Un autre texte : « De votre bonté, et elles tressailliront de joie, en célébrant votre justice. » Un autre interprète dit : « Et elles béniront vos miséricordes. » Quant à nous, après avoir énuméré les choses faites pour effrayer, nous devons aussi nommer les contraires. Nous les voyons, nous les trouvons autour de nous : la succession des saisons, les jours, les jardins, les prairies, la variété des fleurs, la douceur de l’eau qui désaltère, l’influence salutaire des pluies, les fruits de la terre, la variété de ses productions, la diversité des arbres, les vents agréables, les rayons du soleil, le disque étincelant de la lune, le chœur varié des astres, nuits calmes et tranquilles ; parmi les animaux : les brebis, les bœufs, les chèvres ; parmi las bêtes sauvages : les biches, les cerfs, les chèvres et tant d’autres qui sont innombrables ; parmi les oiseaux, ceux dont la chair est bonne à manger[1]. Il est visible que le but du Créateur n’est pas seulement la punition, mais beaucoup plus, le bienfait. Il est des œuvres dont le but est d’inspirer la terreur, et lorsque, parfois, Dieu essaie de pareils moyens, il le fait en vue des hommes tellement insensibles que la crainte même est impuissante à les corriger. Pour les œuvres qui manifestent sa munificence et sa splendeur, ce sont des bienfaits qui s’étendent non seulement sur ceux qui les méritent, mais sur les indignes.
3. Donc, le Seigneur, dans la variété des moyens par lesquels il opère notre salut, emploie tantôt les uns tantôt les autres, et les bienfaits plus souvent que les coups terribles, parce qu’il ne veut que notre bien. Aussi, menace-t-il de la géhenne non pour l’infliger, mais pour ne pas l’infliger. Il la réserve au démon « Allez, dit-il, au feu éternel qui a été préparé pour le démon (Mt. 25,41) ; » mais c’est le royaume du ciel qu’il nous prépare, montrant par là qu’il ne veut pas précipiter l’homme dans la géhenne. « Le Seigneur est clément et miséricordieux ; il est patient et rempli de miséricorde. Le Seigneur est bon envers tous, et ses miséricordes s’étendent sur toutes ses œuvres (8, 9). » Vous voyez que le Prophète insiste sur ces pensées plus douces ; là, son discours s’étend ; il sait, en effet, que c’est en cela surtout que s’exerce la puissance de Dieu. Dieu n’aurait pu nous conserver, si sa clémence n’eût été grande ; si nous continuons de vivre, c’est grâce à son immense bonté ; et voilà pourquoi il disait « C’est moi qui efface vos iniquités, et je vous ai défendus dans vos péchés. » (Is. 43,25) « Le Seigneur est clément et miséricordieux. » Voyez de quelle manière le Psalmiste démontre cette ineffable clémence ; non seulement Dieu a pitié des pécheurs, mais le Seigneur prouve encore autrement sa rare clémence, par la douceur, par la patience avec laquelle il attend le repentir ; de telle sorte que le pécheur peut, grâce à la clémence divine d’abord, grâce ensuite à son zèle propre, recouvrer son salut avec la confiance que donne l’accomplissement du devoir. Mais Dieu n’est pas seulement un Dieu de miséricorde ; ajoutez qu’il est plein de miséricorde. Le Psalmiste montre par là que cette miséricorde ne se peut mesurer, qu’elle est incompréhensible, qu’aucun discours ne la peut expliquer. Toutefois, par ce qu’il ajoute, il nous la montre, autant

  1. A la leçon Ἰνδιχούς du texte, nous préférons celle-ci qui est par deux manuscrits Καὶ τοὺς πρὸς τροφὴν ἐπιτηδείους.