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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/395

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et ils disaient : Saint, Saint, Saint est le Seigneur des armées. La terre est pleine de sa « gloire. » (Is. 3) Que nous indiquent, que signifient ces ailes ? Ces puissances n’ont pas d’ailes puisqu’elles n’ont pas de corps ; mais par ces figures sensibles, le Prophète veut nous faire comprendre des choses cachées, il condescend par là à la faiblesse de ceux qui l’écoutaient, et cependant, par cette condescendance il nous fait entendre excellemment des pensées qui surpassent toute intelligence.
3. Que signifient donc ces ailes ? La nature élevée et sublime de ces puissances. Ainsi nous montre-t-on Gabriel volant et descendant des cieux, pour nous apprendre sa promptitude et sa légèreté. Et vous étonnerez-vous si le Prophète se sert de ces expressions en parlant des puissances qui servent Dieu, quand il n’a pas dédaigné de s’abaisser à ce moyen, en parlant de Dieu même, du Dieu de l’univers ? Car, voulant montrer soit son incorporéité, soit la rapidité avec laquelle il est présent partout, David dit : « Celui qui marche sur les ailes des vents (Ps. 103, 3) ; » les vents n’ont cependant pas d’ailes, et Dieu ne marche pas sur leurs ailes. Comment, en effet, cela se ferait-il, puisqu’il est présent partout ? Mais, comme je l’ai déjà dit, le Prophète condescend à la faiblesse des auditeurs et se sert de choses qu’ils peuvent comprendre pour élever leur pensée. C’est encore ainsi que, pour montrer le secours qu’il reçoit et la sûreté que ce secours lui procure, il se sert des mêmes expressions, disant « Vous me protégerez à l’ombre de vos ailes. » (Ps. 16,8) Ici le Prophète ne veut pas seulement, au moyen de ces ailes, nous faire comprendre l’élévation et la sublimité de ces puissances, mais encore une autre chose qui doit nous frapper de terreur. Il nous montre que, bien que, cette vision ne fût qu’une ombre, un acte de condescendance, cependant les puissances célestes elles-mêmes étaient incapables de s’élever jusqu’à cette hauteur de Dieu qui s’abaissait. Car si elles se cachaient les pieds et le dos, c’est qu’elles étaient effrayées, qu’elles redoutaient la splendeur, qu’elles ne pouvaient supporter l’éclat qui sortait du trône. Aussi se faisaient-elles comme un rempart de leurs ailes pour assombrir l’éclat de cette vision ; elles éprouvaient ce que nous éprouvons quand le tonnerre gronde et que les éclairs brillent, et que nous nous inclinons vers la terre.
Or, si les séraphins, ces grandes et admirables puissances, ne pouvaient regarder qu’avec tremblement Dieu assis et assis sur un trône, s’ils se cachaient la face et les pieds, qui dira la folie de ceux qui se vantent de parfaitement connaître Dieu et qui font sur cette nature immortelle des recherches curieuses ? « Des deux autres ils volaient, et ils criaient. » Qu’est-ce que ce vol et que veut-il signifier ? Qu’ils sont sans cesse autour de Dieu, qu’ils ne s’éloignent pas de lui, que leur office est toujours le même, chanter sans cesse auprès de lui et louer continuellement leur Créateur. Car il n’a pas dit : « Ont crié », mais « criaient », c’est-à-dire qu’ils remplissent sans cesse ce devoir. « L’un à l’autre et ils draient : Saint, Saint, Saint. » Ceci marque que leur entente était parfaite et leur accord à louer Dieu complet. Ce chant n’est pas seulement une louange, mais une prophétie des biens que recevra la terre et une très juste expression du dogme. Mais pourquoi, après avoir dit « Saint » une fois, ne faisaient-ils pas silence ? pourquoi ne s’arrêtaient-ils pas même après l’avoir dit deux fois ? pourquoi le répétaient-ils trois fois de suite avant de faire une pause ? N’est-il pas évident que c’est parce qu’ils chantaient un hymne à la Trinité ? Aussi saint Jean applique-t-il cet hymne au Fils, saint Luc au Saint-Esprit, et le Prophète au l’ère. Et le reste exprime la même pensée. Car après ce chant ils ajoutent : « Toute la terre est remplie de sa gloire. » Ces paroles sont une prophétie exacte ; elles prédisent la connaissance future qui devait remplir toute la terre de la gloire de Dieu, tandis qu’au contraire, dans l’antiquité et au moment même où ces paroles étaient prononcées, toute la terre, et même la Judée, était remplie d’iniquité, et personne ne glorifiait Dieu. Et le Prophète en rend témoignage, lui qui dit : « A cause de vous, mon nom est blasphémé parmi les nations. » (Ps. 52,5) Quand donc la terre a-t-elle été remplie de sa gloire ? Quand cet hymne a été apporté sur la terre, quand les hommes ont chanté avec les puissances célestes, qu’ils n’ont plus fait entendre qu’un même chant, retentir qu’une même louange. (lue si un juif impudent refuse de me croire, qu’il me montre quand la terre a été remplie de la gloire de Dieu, de cette gloire qui vient de la connaissance, mais jamais il ne pourrait me le montrer, quand il me démentirait mille fois. « Le dessus de la