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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/40

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d’être revêtus de leurs armes ? Et du temps de Gédéon, les guerriers qui furent pris étaient égaux à ceux qui ne le furent pas, car ils étaient tous en évidence[1]. (Jug. 7) Pourquoi donc tout cela arrive-t-il ainsi ? Pour que ceux qui reçoivent ces ordres soient amenés à croire. En effet, notre âme vivant avec notre corps, et ne voyant jamais rien d’immatériel, est en admiration devant les objets sensibles, et elle a besoin d’être conduite par les choses visibles aux choses intelligibles. C’est pour cela que les prophètes, en pariant de Dieu, ont été obligés d’emprunter des termes désignant les diverses parties du corps humain, non pas qu’ils voulussent assimiler à nos organes cette nature incorruptible, mais c’était pour enseigner, au moyen de choses humaines, des dogmes surhumains, à cette âme qui vit associée à, une nature matérielle. Ainsi, comme l’action même de Dieu est quelque chose d’intelligible, pour que les hommes d’alors n’y fussent pas incrédules, Dieu y met quelque chose de sensible. S’il eût dit : En sept jours la ville sera détruite sans que vous bougiez, sans que vous fassiez rien, peut-être plusieurs n’y auraient pas cru. Au lieu de cela, il leur donne les ordres que nous avons vus, comme pour servir de soutien à leur pensée humaine. Et afin que vous ne supposiez pas que ceci est une pure conjecture, je veux vous raconter une antique histoire qui donnera du crédit à mes paroles. Il y avait un certain syrien qui s’appelait Naaman. Il avait été atteint de la lèpre et était honteux de son mal ; comme il courait aussi un grand danger, il vient en Palestine (car il faut que j’abrège) pour obtenir du prophète la délivrance de son mal. Il arrive donc, et se tenant à la porte de l’homme de Dieu, il appelait celui qui devait le guérir. Le prophète entendit, mais il ne sortit pas, il envoya des gens à Naaman pour lui ordonner de se plonger dans le Jourdain. Comme l’ordonnance était toute simple, très-facile à saisir, et qu’elle n’exigeait pas une intelligence bien profonde, Naaman n’y crut point. Au lieu de cela, que dit-il ? « Je me disais : il sortira de chez lui, il mettra sa main sur moi, il invoquera son Dieu et il guérira la lèpre. » (2R. 5,11) Vous voyez cet esprit, comme il avait besoin d’une figure sensible. Ne point croire qu’il suffisait de l’ordonnance du médecin, mais qu’il fallait encore l’attouchement de la main, cela tenait à l’état de maladie de celui qui se faisait soigner. Eh bien ! ceci nous donne la clef de bien d’autres choses. C’est pour cela que Jésus ne guérit pas toujours par la parole, mais aussi avec la main. En effet, il mit son doigt sur la bouche et sur la langue du muet ; d’autres fois, c’est par la parole seule, d’autres fois par sa volonté qu’il fait tout, lorsqu’il s’agit de guérir ceux qui viennent à lui. (Mc. 7,33)
Et pourquoi cette conduite ? C’est par égard pour la faiblesse de ceux qui viennent le trouver. La preuve en est qu’il donnait des éloges à ceux qui n’avaient pas besoin de ces sortes de signes. « En vérité je vous le dis, que même en Israël je n’ai pas trouvé une aussi grande foi (Mt. 8,10) ; » parole qu’il prononce, parce que le centenier ne l’avait pas fait venir chez lui, mais avait dit que son ordre suffisait. Aussi, à l’égard du roi Ézéchias, il n’y a rien de tel, mais seulement une prédiction, à laquelle n’était ajouté aucun signe humain, et pour cette raison aussi, sous le monarque qui s’enflamma de jalousie à propos de son épouse, l’ordre donné avait quelque chose de plus matériel. Et si vous voulez prendre ceci dans le sens ananogique, « Car toutes choses », dit l’Apôtre, « leur arrivaient par figure ; et elles ont été écrites pour l’instruction de nous « autres, qui sommes venus à la fin des siècles (1Cor. X, 11) ; » songez aux docteurs les plus excellents de l’Église, qui en guise de trompette se servent de la parole pour renverser les murailles de nos adversaires, songez aux peuples qui sont revêtus de toutes les « armes » de Jésus. Ce nombre de sept jours abolit d’avance pour nous le sabbat. Car ces sortes de commandements de la loi n’ont pas été donnés d’une manière essentielle. Aussi l’Écriture dit-elle au sujet des sacrifices : « Qui est-ce qui a exigé ces choses de vos mains ? » (Is. 1,12) Et autre part : « Est-ce que les prières et les viandes sacrées effacent les péchés ? » (Jer. 11,15) Et encore : « Est-ce que « vous m’avez offert des victimes et des sacra« faces dans le désert pendant quarante ans ? » (Amo. 5,25) Et ceci : « Pourquoi m’apportes« tu de l’encens de Saba, et du cinnamome d’un pays lointain ? » (Jer. 6,20) Et dans un autre endroit : « Vous n’avez pas voulu de sacrifice ni d’offrande. » (Ps. 39,7) Et encore : « Dieu veut-il d’autres holocaustes et d’autres sacrifices, que notre obéissance envers

  1. Cet endroit est très-obscur, et l’éditeur bénédictin avoue ne pas le comprendre.