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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/452

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les entendent. Il n’y a pas de pays étranger, il n’y a pas de contrée barbare où ne se fasse pas entendre la voix du ciel. Scythe, Thrace, Maure, Indien, Sarmate, tous, en quelque langue qu’ils s’expriment, sont en état d’entendre cette voix. Comment, de quelle façon ? Écoutez donc comment il se fait que le ciel parle dans son silence.
Quand vous considérez sa beauté, sa grandeur, sa position, sa durée, son éclat, et qu’après avoir repassé toutes ces choses en vous-mêmes vous glorifiez le Créateur, vous bénissez l’auteur de ces merveilles, c’est le ciel qui prend une voix, qui par votre bouche rend hommage à Dieu. Tel est le sens de cette parole : « Les cieux racontent la gloire de Dieu. » En quelle façon ? En éveillant un sentiment d’admiration pour le Créateur chez celui qui en contemple l’éclat et la beauté. En effet, quant à la vue d’un si grand ouvrage, vous vous écriez : Gloire à vous, ô Dieu, pour ce corps immense que vous avez formé et offert à nos regards ! ce sont les cieux qui prononcent cet hommage par le ministère de votre langue, et en frappant vos yeux pour exciter votre admiration. C’est ainsi que, dans leur silence, ils glorifient Dieu et que tous les hommes entendent leur voix. Comme ce n’est pas à l’ouïe que ce langage s’adresse, mais à la vue et aux regards, et que la vue est la même chez tous, quand bien, même le, langage est différent, comme les Barbares, les Scythes ; les Thraces, les Maures, les Indiens, entendent également cette voix, en d’autres termes, contemplent également ces prodiges, admirent également tant de beauté, de grandeur, de magnificence, enfin tout ce qui distingue le ciel, tout ce qui est dans son bon sens rend pareillement hommage au Créateur. On peut dire la même chose du jour et de la nuit.
Si le ciel par sa beauté, sa position, sa grandeur, son éclat, sa durée, par les services qu’il nous rend, par les propriétés qui le distinguent, que sais-je encore ? provoque l’admiration de celui qui le contemple, et l’invite à glorifier le Créateur, la nuit et le jour ont la même vertu. Considérez-vous l’ordre qui préside à cette distribution du temps, comment le jour, exact à remplir sa carrière, s’abstient d’empiéter sur le domaine de la nuit, reste scrupuleusement enfermé entre ses propres limites, et au lieu de se prévaloir de son éclat plus vif pour usurper le temps tout entier, se retire pour faire place aux ténèbres ; comment la nuit, de son côté, quand elle a terminé sa course, cède la place au jour ; comment enfin celte succession se reproduit depuis tant d’années sans confusion, sans désordre, sans que la nuit ait fait tort au jour, sans que le jour, malgré sa lumière plus intense, ait envahi le domaine de la nuit ? Ici encore, en retrouvant l’ordre, ne vous sentez-vous pas porté dans votre admiration à glorifier le Seigneur ? Comme on voit deux tendres sueurs respecter fidèlement les droits mutuels que leur assure le partage, fait avec poids et mesure, de l’héritage paternel : ainsi la nuit et le jour restent chacun à la place que lui assigne la répartition du temps, et se gardent bien de toucher l’un à la part de l’autre, ainsi que l’expérience a dû vous en convaincre.
Écoutez, spoliateurs, écoutez, vous qui frustrez vos frères de leur héritage : rougissez en voyant tant de symétrie dans le partage du temps, tarit d’égalité entre le jour et la nuit ; et guérissez-vous de votre infirmité. C’est de cette manière que le « jour parle au jour, que la nuit instruit la nuit : » non que le jour ou la nuit ait un langage, à proprement parler mais l’ordre, l’harmonie, l’égalité, la symétrie invariable qui président à leur succession, rendent au Créateur un hommage plus éclatant que le son de la trompette, non dans un coin du monde, mais dans tous les lieux que visite le soleil. Ces voix retentissent dans tous les lieux de l’univers, attendu que partout on voit le ciel, partout le jour, partout la nuit : et cet enseignement se propage sur la terre et les flots. – Voilà pourquoi le Prophète, au lieu de dire simplement que les cieux révèlent la gloire de Dieu, dit qu’ils la racontent : c’est un enseignement qu’ils donnent ; le genre humain, voilà leurs disciples ; ils ouvrent une immense école où, au lieu de livres et de textes, ils offrent à l’étude de tous, ignorants ou doctes, la beauté de leur nature ; où l’on peut lire ce qu’ils enseignent au sujet de la sagesse et de la puissance divine. C’est ainsi que les hommes n’ont pas besoin de parler, et célèbrent Dieu jusque dans leur silence par la bouche d’autrui. « Que votre lumière lune devant les hommes, afin qu’ils voient vos bonnes œuvres et qu’ils glorifient votre Père qui est dans les cieux. » (Mat. 5, 16)
De même que la vue d’une belle vie nous porte à louer Dieu, quand bien même celui