Aller au contenu

Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/453

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que nous admirons garderait le silence : de même les beautés du ciel nous invitent, par leur seul aspect, à en glorifier l’auteur. De là ces paroles : « Les cieux racontent la gloire de Dieu : » entendez, par la bouche de ceux qui les contemplent. « Le jour en parle au jour, et la nuit en instruit la nuit : » En, c’est-à-dire de leur auteur. – Si le jour appelle l’homme au travail, la nuit qui vient ensuite, le repose de ses fatigues innombrables, le délivre de ses inquiétudes ; en assoupissant ses yeux lassés, en fermant ses paupières, elle répare ses forces pour la prochaine visite de l’aurore. Loin d’être inutile, elle nous rend donc, au contraire, le plus grand service. Si elle ne venait pas à sien tour soulager l’homme épuisé de lassitude, c’est en vain que le jour ramènerait pour lui le moment du travail : sa nature succomberait à la continuité de la fatigue, il dépérirait, il mourrait : de quoi lui serviraient les rayons du soleil ? La nuit, qui rend le jour profitable à l’homme est aussi ce qu’il y a de plus propre à acheminer par ses bienfaits, à la connaissance de Dieu, l’être admis à jouir de ce spectacle. En réfléchissant quelle est l’utilité du jour, quelle est celle de la nuit, comment la nuit succède au jour, comment tour à tour, dans leur cours périodique et régulier, l’un et l’autre se relaient pour le salut de notre espèce, le plus stupide des hommes n’aura pas de peine, pour peu qu’il consulte sa raison, à comprendre la sagesse que le divin artiste a déployée en faisant le jour et la nuit, le premier destiné au travail, l’autre réservée pour le repos.
3. Toute cette digression nous a été suggérée par le début du Prophète. Mais comme il y a peut-être dans ce qui vous a été lu aujourd’hui des paroles qui ont pu scandaliser quelques auditeurs inattentifs ou peu versés dans les Écritures, faisons diligence afin d’y arriver. Vous avez entendu l’histoire de l’hémorrhoïsse qui arrêta, par un simple contact, ses pertes de sang ; le pouvoir de la foi la fit réussir dans cet heureux larcin : car c’était bien un larcin, mais un larcin glorieux, et celle qui l’avait commis obtint des éloges quand elle eut été surprise. C’est Jésus lui-même, en effet, c’est la victime du vol qui en loue l’auteur. Vous avez entendu la flétrissure imprimée à Paul, ses blessures, ses emprisonnements, ses comparutions en justice, ses naufrages, ses fers, ses chaînes, les pièges de tout genre auxquels il ne cessa d’être en butte, ses supplices quotidiens, la faim, la soif, la nudité, les complots journaliers qui le menaçaient. Mais où me laissé-je entraîner ? Hâtons-nous de fuir, de peur que Paul à son tour ne nous arrête, ne nous détourne de notre objet. Bien des fois, vous le savez, quand je marchais dans une autre route, il m’a suffi de le rencontrer sur mes pas pour m’arrêter au milieu de mon discours, et rester sous le charme au point de ne plus parler que de lui seul. Pour éviter aujourd’hui pareille mésaventure, mettons un frein à nos paroles, dirigées vers un autre but, et ramenons-les de force au texte du Prophète.
Quel est donc ce texte ? « Moi le Seigneur qui ait fait la lumière et les ténèbres, qui fais la paix et crée les maux. » Vous le voyez ce n’est pas sans raison que nous nous sommes hâté d’arriver à cet endroit, et avons négligé tout le reste afin d’y parvenir. En effet, cette parole est faite pour scandaliser le lecteur inattentif. Faites donc attention, prêtez-moi une oreille vigilante, et rejetez loin de vous tous les soucis mondains, pour ne songer qu’à ce qui nous occupe. C’est ainsi que je veux vous récompenser de votre présence en ce lieu : je veux vous rassasier des aliments spirituels, de telle sorte que les absents puissent se convaincre du tort qu’ils se sont fait à eux-mêmes ils en seront informés si, non contents d’écouter avec soin nos paroles, vous savez en outre leur en faire part. « Moi le Seigneur Dieu qui ai fait la lumière et les ténèbres, qui fais la paix et crée les maux. » Je reviens incessamment sur ce texte pour le bien graver dans vos esprits, avant de vous l’expliquer. Ce n’est pas Isaïe seul qui parle de la sorte. Un autre prophète a dit dans le même sens : « Y a-t-il dans la ville quelque mal que le Seigneur n’ait pas fait ? » (Amo. 3, 6) Qu’est-ce que cela signifie ? Car tous ces passages doivent être expliqués de la même manière. Comment donc expliquer ces mots ? En nous rendant compte du sens des termes employés. Mais prêtez-moi une exacte attention. Si nous ne cessons de vous faire cette recommandation, ce n’est point là une vaine formule c’est que les pensées que nous allons aborder, sont des plus profondes. Parmi les choses, il y en a de bonnes, de mauvaises et d’indifférentes : entre ces dernières, un certain nombre passent pour mauvaises aux yeux de la multitude : elles ne le sont point cependant, autrement