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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/58

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accord, là où il existe contradiction ? Est-ce que vous ne savez pas que manger est le contraire de ne point manger, boire de ne pas boire, donner de ne pas donner ? Pourtant il arrive souvent qu’un médecin a recours successivement à ces moyens divers ; non qu’il se contredise : il est au contraire parfaitement d’accord avec lui-même, car il ne vise qu’à un but, la guérison du malade : C’est la même chose pour les évangélistes ; l’été est le contraire de l’hiver, cependant il conspire à un même huit, la maturité des fruits, l’abondance. Le monde tout entier est composé de contraires, mais il montre un parfait accord pour aider à notre vie. Le Christ lui-même suivit une voie opposée à celle de Jean : il mangeait, tandis que Jean ne mangeait pas. « Jean est venu, qui ne mangeait, ni ne buvait, et l’on dit : il a un démon en lui. Le Fils de l’homme est venu, qui mange et boit, et l’on dit : c’est un homme de bonne chère, et qui aime le vin. » (Lc. 7,33-34) Mais malgré cette différence de conduite ; l’un et l’autre conspiraient à un même but, à savoir le salut de ceux qui devaient être pêchés. – De même pour l’ordre oit sont placées la Divinité et l’Incarnation : Jean s’accorde avec les autres, bien qu’il prenne une voie contraire. Comment ? je vais le dire. Au commencement, quand la parole n’était pas encore répandue, il était naturel d’insister sur l’In car nation,.et de consacrer tous ses efforts à établir ce dogme, en préludant parce qu’il y avait de plus matériel et de plus accessible aux sens. Mais une fois que la doctrine fut enracinée, quand les hommes eurent reçu la nouvelle, alors il devint à propos de remonter plus haut. Voilà pourquoi les prophètes, quand ils viennent à parler du Christ commencent, débutent par l’Incarnation. Voyez par exemple comment Michée prend les choses du plus bas : « Et toi, Bethléem, terre de Juda, tu n’es aucunement petite parmi les princes de Juda. « De toi, en effet, sortira le chef qui sera pasteur de mon peuple Israël. » (Mic. 5,2) Cependant ce qui devait sortir de Bethléem, ce n’était point la divinité, mais la chair. Mais il ne s’en tient pas là, il remonte jusqu’à la divinité, en disant : « Et sa sortie est du commencement des jours de l’éternité. » Isaïe dit aussi : « Voici que la vierge concevra, et enfantera un fils, et on l’appellera de son nom Emmanuel, ce qui veut dire Dieu avec nous. » (Is. 7,1,4) Voyez-vous comment Isaïe aussi remonte de la chair à la divinité ? Ailleurs, c’est encore la même chose ; il dit : « Un enfant nous est né, un fils nous a été donné, et il est appelé de son nom Ange de grand conseil, admirable conseiller, Dieu fort, puissant, prince de paix, père du siècle futur. » (Is. 10,6) Il a commencé par l’enfance, par l’incarnation, et voici que, montant par degrés il arrive à la divinité. C’est ainsi que le père s’était révélé d’abord par la création : « Ses perfections invisibles », dit Paul, « rendues compréhensibles depuis la création du monde par les choses qui ont été faites, sont devenues visibles. » (Rom. 1,20) Aussi se représente-t-il souvent lui-même sous des apparences sensibles, afin d’amener peu à peu le genre humain à la conception des choses incorporelles. Et pourquoi vous étonner de retrouver dans les dogmes cette marche que sa Providence suit dans les préceptes qu’elle nous donne ? Voilà pourquoi le Prophète parle ici comme il fait, s’élevant de la chair à la divinité (car les lèvres sont de la chair) et redescendant après cela de la divinité à la chair : la diversité de son langage n’est qu’un moyen dont il se sert pour le salut de ceux qu’il instruit. « Votre trône, ô Dieu, subsiste éternellement : » trône en cet endroit ne signifie point ce qu’on entend généralement par là, mais la royauté. Ici, ce trône est qualifié d’éternel, ailleurs de sublime : « J’ai vu le Seigneur assis sur un trône sublime. » (Is. 6,1) Et ailleurs : « Parce que votre trône est sublime. » Un autre prophète voit Dieu assis sur un trône de gloire. David montre que c’est aussi un trône de bonté : « Miséricorde et jugement sont le redressement de son trône. » (Ps. 96,2)
9. Tout cela doit être entendu de la royauté c’est elle qui est impérissable sans fin, glorieuse, sublime, forte et solide. De plus elle n’a pas eu de commencement, comme le prouvent ces mots : « Votre royauté est une royauté de tous les siècles. » (Ps. 140,5, 13) Si le trône est un emblème de la royauté, le sceptre symbolise à la fois la royauté et le pouvoir judiciaire. Delà ces mots : « Le sceptre de votre « royauté et un sceptre de droiture. » – Là-haut, en effet, la justice est toute pure, la droiture sans déviation : ce ne sont plus, comme ici-bas, de simples esquisses. Écoutez, insensés, écoutez, misérables fous, si toutefois c’est assez dire. De qui veux-je parler ? De ceux qui accusent la Providence et disent. Pourquoi ceci