Page:Cicéron, Démosthène - Catilinaires, Philippiques, traduction Olivet, 1812.djvu/161

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voir dans toutes nos rues des tas de Citoyens massacrés et sans sépulture. Je me mets devant les yeux un Céthégus, dont la fureur se baigne dans votre sang.

12. Je me figure Lentulus le sceptre à la main, selon la destinée dont il se vantoit ; Gabinius honoré de la pourpre ; Catilina entrant dans Rome à la tête d’une armée ; les mères poussant des cris lamentables ; les filles, les enfans prenant la fuite ; les Vestales exposées à l’insolence du soldat. J’en frémis : et plus ces horreurs doivent exciter notre compassion, plus mon zèle s’allume contre des scélérats, qui ont prétendu nous réduire à de si affreuses extrémités. Quoi, si un esclave avoit brûlé la maison et poignardé la femme et les enfans de son maître, diroit-on de son maître, lorsqu’il le punit avec la dernière rigueur, que c’est le plus cruel de tous les hommes ; ou que c’est un cœur sensible et plein de pitié ? Pour moi, je le croirois de bronze, s’il ne cherchoit pas à noyer une partie de sa douleur dans le sang de son esclave. À l’égard donc des scélérats qui ont voulu égorger, qui ont voulu massacrer nos femmes et nos enfans, mettre le feu à toutes nos maisons, détruire Rome de fond en comble, livrer cet Empire à des Allobroges, et les établir sur les ruines, sur les cendres de cette ville ; la sévérité fera voir que nous sommes touchés de compassion ; et il paroîtroit, si nous étions moins