Page:Cicéron, Démosthène - Catilinaires, Philippiques, traduction Olivet, 1812.djvu/55

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si justement menacé ? Prenez, me dites-vous, l’avis du Sénat : et s’il m’exile, j’obéirai. Non, je n’aimerois point à vous attirer une condamnation expresse : il y auroit à cela une dureté qui me répugne : mais en prenant un autre biais, je vous ferai concevoir la pensée du Sénat : Partez, Catilina, mettez fin à nos alarmes : si vous attendez qu’on ait proféré le mot d’exil, on le profère : partez. Hé bien, remarquez-vous le silence de tout le Sénat ? Il acquiesce, il se tait. Pourquoi attendre qu’il parle, qu’il commande, puisque son silence en dit assez.

21. Si j’avois tenu le même discours au jeune et vertueux Sextius, ou à l’illustre[1] Marcellus, j’aurois vu le Sénat, dans ce Temple même s’élever avec indignation contre moi, tout Consul que je suis ; il auroit eu raison. Mais sur votre sujet, Catilina, le Sénat, en se taisant, approuve ; en acquiesçant, il commande ; en ne disant mot, il prononce hautement votre arrêt. Tel est donc l’avis, non-seulement de ces Sénateurs, dont vous feignez de révérer l’autorité, prêt à répandre leur sang, mais encore de tous ces illustres Chevaliers Romains, et de tous ces généreux Citoyens qui environnent le Sénat. Vous êtes témoin de leur affluence et de leur zèle : vous avez entendu, il n’y a qu’un moment, leurs clameurs : j’ai eu peine jusqu’ici à les empêcher d’assouvir sur vous leur colère ; et cependant, si vous quittez Rome, je me fais fort d’obtenir qu’ils vous accompagnent par honneur jusqu’aux portes.

  1. On voit assez que ce Marcellus n’est pas celui dont il est parlé dans la pape précédente. C’est ici celui pour qui Ciréron, dix-sept ans après, fit une si belle harangue devant César.