Page:Cicéron - Œuvres complètes, Nisard, 1864, tome I.djvu/233

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la torture ; étudiez-vous à découvrir la vérité. » Cette figure a quelque chose de piquant, de vif et de rapide.

Il y a Réticence, lorsqu’après avoir dit quelques mots, on s’arrête sans achever, et en laissant le reste à l’intelligence des auditeurs. Ainsi : « Notre différend ne vient pas de ce que le peuple romain m’a…. Je m’arrête, de peur d’être taxé de vanité ; quant à vous, il vous a jugé digne de mépris. » - « Osez-vous parler ainsi maintenant, vous qui dernièrement dans une maison étrangère… je n’ose achever, de peur que ce que vous faites, en passant par ma bouche, ne paraisse indigne de moi. » Dans ce cas un soupçon tacite fait plus de mal qu’une chose longuement expliquée.

La Conclusion argumente, en peu de mots, de ce qui a été dit ou fait précédemment, pour en tirer une conséquence nécessaire ; par exemple : « Puisque l’oracle avait prédit aux Grecs que Troie ne pouvait être prise sans les flèches de Philoctète, et que les flèches n’ont servi qu’à frapper Pâris, la prise de Troie, c’était donc la mort de Pâris. »

XXXI. Reste encore dix figures de mots, que nous n’avons pas dispersées çà est là, mais au contraire séparées des autres, parce qu’elles appartiennent toutes à la même espèce. Toutes ont en effet ce caractère particulier, qu’elles détournent les mots de leur signification ordinaire, pour leur en donner une différente qui ajoute à l’élégance du style.

La première est l’Onomatopée ; c’est par elle qu’une chose qui n’a pas un nom ou dont le nom ne lui est pas assez propre, est désignée pu un mot nouveau imitatif ou expressif. Les mols imitatifs ont été créés par nos ancêtres, tels que ceux-ci : 'rudere, vagire, mugire, murmurare., siblare. Voici un exemple de mots énergiques : Postquam iste in rempublicam fecit impetum, fragor civitatis in primis est auditus. On doit se servir rarement de cette figure, de peur que ces continuelles innovations ne déplaisent à l’auditeur ; mais si l’on en fait un usage convenable et peu fréquent, cette nouveauté, loin d’être fatigante, devient un ornement.

L’Antonomase désigne par une espèce de surnom étranger ce qu’on ne peut pas appeler par son nom propre ; ainsi, par exemple, en parlant des Gracques, un orateur dira : « Mais, répondra-t-on, les petits-fils de l’Africain ne se conduisirent pas de la sorte. » Ou bien, il dira de son adversaire : « Videte nunc, judices, quemadmodum me Plagiosippus iste tractant. » On peut, au moyen de cette figure, donner à l’éloge ou au blâme une tournure élégante, en se servant au lieu du nom propre, d’un surnom pris de quelque qualité du corps ou de l’esprit, ou de quelque objet extérieur.

XXXII. La Métonymie a recours pour désigner une chose dont elle rejette le nom propre, à un mot tiré d’un objet qui présente avec elle quelque rapport intime. Tantôt elle remplace le nom de l’inventeur par celui de l’invention ; par exemple, en parlant de Tarpeius, on l’appellera Capitolin. Tantôt elle prend celui de l’inventeur pour le donner à la chose inventée ; ainsi, Bacchus pour le vin, Cérès pour le blé. D’autres